Le 5 novembre 2006, alors que son bateau de transport fluvial stationnait dans la darse n° 2 du port de Gennevilliers, Madame H a chuté du quai en utilisant l’une des échelles pour regagner son embarcation. A la suite de cette chute, elle a été hospitalisée, puis admise dans un centre de réadaptation.
Etant devenue définitivement paraplégique, Madame H a sollicité, postérieurement au dépôt du rapport d’expertise, l’indemnisation de ses préjudices au Port Autonome de Paris, lequel a rejeté cette demande, à la faveur d’une décision du 20 décembre 2013.
Les consorts H ont soumis cette décision à la censure du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en demandant la condamnation du Port autonome de Paris et de son assureur à lui verser la somme de 2.307.845,60 euros en réparation de leurs préjudices.
Les juges de première instance ayant rejeté leur recours, les consorts H ont interjeté appel devant la cour administrative d’appel de Versailles.
Les juges d’appels commencent par rappeler que si « une collectivité publique peut en principe s’exonérer de la responsabilité qu’elle encourt à l’égard des usagers d’un ouvrage public victimes d’un dommage causé par l’ouvrage si elle apporte la preuve que ledit ouvrage a été normalement aménagé et entretenu », « sa responsabilité ne peut être engagée à l’égard des usagers, même en l’absence de tout défaut d’aménagement ou d’entretien normal, que lorsque l’ouvrage, en raison de la gravité exceptionnelle des risques auxquels sont exposés les usagers du fait de sa conception même, doit être regardé comme présentant par lui-même le caractère d’un ouvrage exceptionnellement dangereux ».
Or, en l’espèce, la cour administrative d’appel considère que si l’échelle de quai litigieuse présente des particularités qui supposent que les usagers l’utilisent avec précaution, elle ne saurait pour autant présenter des risques excédants ceux qui sont inhérents à ce type d’ouvrage, et présenter le caractère d’un ouvrage exceptionnellement dangereux.
Ainsi, dès lors que l’échelle ne présente pas le caractère d’un ouvrage public exceptionnellement dangereux, il revient à l’usager victime du dommage d’apporter la preuve du lien de causalité entre l’ouvrage et le dommage dont il se prévaut. En contrepartie, Port autonome de Paris peut s’exonérer en rapportant la preuve soit de l’entretien normal de l’ouvrage, soit de ce que le dommage est imputable à l’usager victime, soit encore d’un cas de force majeure.
Et, sur ce point, les consorts H prétendent que la cause de la chute de Madame H s’expliquerait par le fait que, pour accéder à l’échelle, elle a dû enjamber une poutre de couronnement formant un surplomb par rapport aux palplanches du quai contre lesquelles se trouve l’échelle.
Cependant, les juges d’appel s’appuient sur les photographies versées au débat pour relever qu’un dispositif constitué de deux crosses était présent pour pallier le manque de visibilité et permettre à l’usager d’enjamber la poutre et d’atteindre ainsi l’échelle. Ce dispositif permet donc l’utilisation suffisamment sécurisée de l’échelle de quai par un usager normalement vigilant.
Au surplus, il est également précisé à la charge de Madame H que celle-ci était habituée des installations portuaires en sa qualité de conjoint collaborateur et connaissait les lieux.
Ce faisant, la cour administrative d’appel de Versailles conclut que Port autonome de Paris a apporté la preuve de l’absence de vice de conception de l’ouvrage public en cause et, plus généralement, de son entretien normal. En conséquence, elle rejette le recours formé par les consorts H.
CAA Versailles, 16 janvier 2020, Consorts H, req. n° 17VE01304