Le régime de la notification du recours contentieux en matière d’urbanisme une nouvelle fois précisé par le Conseil d’Etat

A la faveur d’une décision rendue le 5 août dernier, le Conseil d’Etat a rappelé une nouvelle fois les règles applicables à la notification du recours contentieux en matière d’urbanisme.

En l’espèce, le 28 novembre 2017, le maire de la commune de Beaurecueil a délivré à M. C un permis de construire un immeuble à usage d’habitation comportant deux logements. Cet arrêté a été déféré à la censure du tribunal administratif de Marseille par la société E Beaurecueil ainsi que par M. et Mme E.

Cependant, la requête formée par ces derniers a été rejetée par ordonnance du 18 avril 2019.

Contestant cette décision, la société E Beaurecueil et M. et Mme E se sont pourvus en cassation.

Aux visas de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, le Conseil d’Etat rappelle qu’en cas de recours contentieux contre un permis de construire, de même qu’en cas de demande tendant à l’annulation d’une décision juridictionnelle concernant un permis de construire, l’auteur du recours doit impérativement notifier son recours tant à l’auteur de la décision qu’au pétitionnaire, sous peine d’irrecevabilité.

Aux termes de cet article, il est également précisé que la notification doit être effectuée par lettre recommandée avec accusé de réception, et ce dans un délai de 15 jours francs à compter du dépôt du recours, étant précisé que la notification est réputée accomplie à la date d’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception.

La Haute Juridiction précise néanmoins que le régime de notification institué par l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme doit être combiné avec l’article R. 424-15 du même code, lequel prescrit les conditions d’affichage du permis de construire sur le terrain d’assiette de la construction.

En effet, il faut souligner que l’irrecevabilité résultant de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme ne peut être opposée en première instance, en appel ou en cassation, qu’à la condition que l’affichage du permis de construire ait fait mention de cette obligation, conformément à l’article R. 424-15 du même code.

Or, en l’occurrence, le Conseil d’Etat relève que si le permis a effectivement été affiché par les pétitionnaires, le constat d’huissier produit par les requérants atteste que celui-ci était vierge de toute inscription, méconnaissant ainsi les dispositions de l’article R. 424-15 du code de l’urbanisme.

Ainsi, dans la mesure où l’affichage du permis de construire n’a pas fait mention de l’obligation de notification prévue par l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, le pourvoi formé par les requérants ne saurait être considéré comme irrecevable, au motif qu’ils ne l’auraient pas notifié.

S’agissant désormais de l’ordonnance attaquée, le Conseil d’Etat précise, en application de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, que s’il appartient au juge administratif de rejeter, au besoin d’office, le recours comme irrecevable dès lors qu’après y avoir été invité, son auteur n’a pas justifié de l’accomplissement des formalités de notification requises par l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, en revanche, la production du certificat de dépôt des lettres recommandées suffit à justifier de cet accomplissement, et ce notamment lorsque le contenu de ces lettres n’est pas débattu devant le juge.

Dans le cas d’espèce, le Conseil d’Etat juge que le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit en rejetant comme manifestement irrecevable la demande formée par la société E Beaurecueil et M. et Mme E, en se fondant sur le fait que les requérants n’avaient transmis au tribunal que les certificats de dépôts des lettres recommandées sans les accompagner de la copie de ces lettres, et ce alors que le contenu de la notification n’avait pas pu être contestée ni par la commune, ni par le pétitionnaire, dans la mesure où la requête ne leur avait pas été communiquée.

En conséquence, le Conseil d’Etat annule l’ordonnance et renvoie l’affaire au tribunal administratif de Marseille.

 

CE, 5 août 2020, Société E Beaurecueil et M. et Mme E, req. n° 432010