Tarif d’accès du parking du Mont-Saint-Michel : l’Autorité de régulation des transports enjoint à l’exploitant du parking de revoir ses tarifs à la baisse et apporte des précisions s’agissant des modalités d’application dans le temps de ses décisions de règlement de différend

Parmi ses attributions, l’Autorité de régulation des transports (ART) est notamment chargée de la régulation des aménagements de transport routier, et doit veiller au respect des principes fixés aux articles L. 3114-5 à L. 3114-7 du code des transports. Les exploitants d’aménagements routiers sont astreints, à ce titre, à tenir une comptabilité propre à cette exploitation et à définir des règles d’accès aux équipements régulés, portant notamment sur leurs tarifs d’utilisation. En vertu de l’article L. 3114-12 du code des transports l’ART a précisé, par décision motivée du 4 octobre 2017, les règles relatives aux tarifs et à la comptabilité propre à ces aménagements.

 

L’ART peut être saisie d’une demande de règlement de différend notamment par toute entreprise ayant vocation à utiliser ces infrastructures, qui estimerait que les règles d’accès, y compris tarifaires, définies par l’exploitant ne respectent pas les règles fixées par le code des transports ou par l’ART.

 

En l’espèce, saisie d’une demande de règlement de différend par la société FlixBus France, entreprise de transport public routier de personnes, tendant à la modification, y compris pour le passé, des tarifs appliqués par l’exploitant du parc de stationnement du Mont-Saint-Michel pour l’accès au parking P7 de ce parc, l’Autorité de régulation des transports (ART) a enjoint, par décision rendue le 16 juillet 2020, à cet exploitant de modifier, uniquement pour l’avenir, les tarifs considérés.

 

Le parking P7 est celui destiné à accueillir les autocars autres que ceux réalisant des services conventionnés organisés par les régions Normandie et Bretagne.

 

Pour conclure en ce sens, l’ART a d’abord écarté plusieurs fins de non-recevoir, considérant que :

  • l’autorité délégante de la gestion et de l’exploitation de cet aménagement – le syndicat mixte Baie du Mont-Saint-Michel – détenait bien une compétence en matière de création et d’exploitation d’un aménagement de transport routier ;
  • le parking P7 constituait bien un aménagement routier, dans la mesure où il est accessible au public et est bien destiné à faciliter la prise en charge ou la dépose de passagers de services réguliers de transport routier, au sens de l’article L. 3114-1 du code des transports, l’ART ayant notamment constaté, à la suite de mesures d’instruction, que les services librement organisés accèdent au parking P7 ;
  • le parking P7 constituait bien un aménagement régulé, dès lors qu’il avait fait l’objet d’une demande de desserte de la part d’un opérateur souhaitant exploiter un service librement organisé.

 

S’agissant du montant du tarif appliqué (compris entre 23 et 63 euros TTC, selon la durée du stationnement envisagé et la saison concernée), l’Autorité a tout d’abord constaté qu’il intégrait une quote-part des charges liées à l’exploitation des navettes de l’exploitant de l’aménagement et qu’il excédait donc le simple coût du service rendu majoré d’une rémunération des capitaux investis, méconnaissant ainsi les articles 20 et 22 de la décision adoptée par l’ART le 4 octobre 2017 relative aux règles d’accès aux aménagements routiers.

 

En l’absence de transmission de données comptables par l’autorité délégante ou par l’exploitant de l’aménagement concerné, permettant d’isoler les coûts du parking P7 des autres coûts supportés par l’exploitant, l’Autorité a procédé selon une méthodologie en trois étapes successives, soumise à la contradiction des parties, reposant sur i) l’établissement d’une liste d’aménagements de transport routier, ii) l’identification des facteurs expliquant le niveau des tarifs d’accès à ces aménagements et iii) l’estimation, en conséquence, du tarif d’accès à cet aménagement pour une durée de stationnement inférieure à 30 minutes.

 

Au titre de la première étape, l’ART a établi une analyse comparative des tarifs d’accès aux aménagements routiers, relevant que le tarif est compris entre 0,6 et 13 euros TTC et en moyenne légèrement supérieur à 5 euros TTC.

 

Elle relève, ensuite, que parmi les facteurs déterminants du niveau des tarifs appliqués, figurent principalement le niveau de qualité de service et la taille de l’aménagement, le trafic ne constituant en revanche pas un facteur pertinent.

 

Au regard des caractéristiques du parking P7 (grande taille, qualité de service élevée), l’ART conclut que le tarif d’accès pour une durée de stationnement de 30 minutes ne peut excéder la borne haute constatée pour des aménagements comparables, soit 11,44 euros TTC.

 

Ce faisant, contrainte de raisonner à l’aveugle sur le plan comptable, l’ART a procédé à une analyse comparative pour fixer un tarif maximal susceptible d’être appliqué, par analogie avec les tarifs pratiqués pour des aménagements comparables. Cette méthode permet, faute de mieux, de parvenir à une estimation vraisemblablement plus fidèle au principe de couverture du coût du service rendu que les tarifs pratiqués par l’exploitant, dont celui-ci n’a pas été en mesure de démontrer le bienfondé dans le cadre de la procédure.

 

S’agissant de l’effet temporel de sa décision, et à notre connaissance pour la première fois dans sa pratique décisionnelle, l’ART a précisé, après avoir rappelé qu’elle tient de l’article L. 1263-3 du code des transports le pouvoir d’appliquer rétroactivement la modification des règles d’accès à un aménagement routier lorsque cela est nécessaire pour régler pleinement le différend dont elle est saisie, que s’il apparaît « que le caractère rétroactif de la décision est de nature à emporter des effets manifestement excessifs en raison notamment des situations qui ont pu se constituer lorsque le tarif initial était en vigueur ou de l’intérêt général pouvant s’attacher à un maintien de ses effets, il appartient à l’Autorité de limiter ou d’encadrer les effets temporels de sa décision », s’inspirant manifestement des principes appliqués par le juge administratif en matière de modulation dans le temps des effets d’une annulation contentieuse (voir, notamment, CE Ass. 11 mai 2004, Association AC !, req. n° 255886).

 

En l’espèce, l’ART considère qu’une modification rétroactive du tarif d’accès au parking P7 risquerait d’enrichir indûment les entreprises de transport public routier utilisatrices du parking, dans la mesure où elles ne sont pas en situation d’identifier le nombre de clients qu’il conviendrait de rembourser à la suite de la modification des tarifs appliqués pour le passé.

 

L’ART enjoint donc, en conclusion, à l’exploitant du parking P7 de modifier dans un délai de 15 jours suivant la notification de la décision le tarif d’accès au parking, pour le fixer à un montant maximal de 11,44 euros TTC pour une durée de stationnement de 30 minutes.

 

 

Autorité de régulation des transports Décision n° 2020-042 du 16 juillet 2020 portant règlement du différend entre la société FlixBus France et la société Transdev Mont-Saint-Michel relatif au tarif d’accès du parking P7 du Mont-Saint-Michel

 

 

 

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