Dans un contexte juridique où la notion de « secret des affaires » prend une réelle consistance et importance juridique (notamment dernièrement avec la création d’un « référé en matière de secret des affaires » par le décret n° 2019-1502 du 30 décembre 2019 portant application du titre III de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et autres mesures relatives à la procédure contentieuse administrative), le juge de l’Union Européenne vient rappeler, dans deux affaires respectives, les principes qui fondent l’accès aux documents des institutions de l’Union ainsi que ses limites (CJUE, 22 janvier 2020, PTC Therapeutic International Ltd c/ Agence européenne des médicaments (EMA), aff. C-175/18 P et CJUE 22 janvier 2020, Animal Health Innovation GmbH c/ Agence européenne des médicaments (EMA), aff. C-178/18P).
Dans ces affaires, l’Agence européenne du médicament (EMA) avait donné accès à des tiers à des documents produits par des sociétés pharmaceutiques dans le cadre de leur demande d’autorisation de mise sur le marché de leurs médicaments. Elle considérait effectivement qu’à l’exclusion des informations occultées, ces documents ne présentaient pas un caractère confidentiel. Les sociétés pharmaceutiques concernées ont toutefois estimé que ces documents devaient bénéficier d’une présomption de confidentialité.
Par les décisions commentées, juge de l’Union vient rappeler qu’il existe, en vertu de l’article 1er du règlement n° 1049/2001 relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, un droit d’accès au public aux documents des institutions de l’Union qui doit être le plus large possible (point 53).
Les limitations à ce principe prévues à l’article 4 dudit règlement (comprenant les intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée) doivent ainsi être interprétées et appliquées strictement.
Il ajoute que s’il existe des présomptions jurisprudentielles de confidentialité pour certaines catégories de documents tels que ceux objet du litige, il ne s’agit que d’une simple faculté pour l’institution concernée qui conserve toujours la possibilité de procéder à un examen concret et individuel des documents en cause pour vérifier si ces documents pourraient porter concrètement et effectivement atteinte à des intérêts protégés.
La légalité des décisions de l’Agence européenne du médicament donnant accès à des tiers aux documents contenus dans la demande d’autorisation de mise sur le marché des médicaments concernés est ainsi confirmée par le juge de l’Union qui rappelle également que les sociétés requérantes n’avaient pas démontré les passages des documents qui, s’ils étaient divulgués, pouvaient porter atteinte à ses intérêts commerciaux.
CJUE, 22 janvier 2020, PTC Therapeutic International Ltd c/ Agence européenne des médicaments (EMA), aff. C-175/18 P et CJUE 22 janvier 2020, Animal Health Innovation GmbH c/ Agence européenne des médicaments (EMA), aff. C-178/18 P.