Alors que la loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire et l’ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019 portant diverses dispositions relatives au groupe SNCF avaient fixé au 1er janvier 2020 la prise d’effet de la restructuration du groupe public ferroviaire, le gouvernement a attendu les dernières heures de l’année 2019 pour l’adoption d’une pluralité de décrets nécessaires à l’entrée en vigueur du nouveau dispositif.
Pour mémoire, c’est une « sociétisation » des entités du groupe public ferroviaire qui a été décidée, des sociétés anonymes à capitaux intégralement publics s’étant substituées, au 1er janvier 2020, aux anciens établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités. La société nationale SNCF succède à l’ancien EPIC dit « de tête » ; la société SNCF Voyageurs succède à l’EPIC SNCF Mobilité, et la société SNCF Réseau à l’EPIC du même nom. La principale modification structurelle du groupe public réside dans la translation, dans le giron de SNCF Réseau, de la gestion des gares de voyageurs, laquelle donne lieu à la création d’une filiale spécifique.
Par quatre décrets du 31 décembre 2019, les nouveaux statuts de chacune de ces entités ont été approuvés :
- le décret n° 2019-1585 approuve les statuts de la société nationale SNCF ;
- le décret n° 2019-1587 approuve les statuts de la société SNCF Réseau ;
- le décret n° 2019-1588 approuve les statuts de la filiale de SNCF Réseau dédiée à la gestion des gares de voyageurs, dénommée « SNCF Gares & Connexions » (dans la continuité de la dénomination de l’entité qui, au sein de SNCF Mobilités, était en charge de ces mêmes infrastructures) ;
- le décret n° 2019-1589 approuve les statuts de la société SNCF Voyageurs.
Parmi les quelques points discutés avant l’élaboration de ces statuts, l’on observe notamment que SNCF Voyageurs conserve statutairement l’exploitation d’installations de services (à l’exception des gares de voyageurs), qui constitueront un enjeu important dans la perspective de l’ouverture à la concurrence.
Ces textes ne sont toutefois qu’une partie du bloc normatif adopté en cette fin d’année.
Le décret n° 2019-1582 a ainsi été adopté pour préciser les règles de financement des investissements de SNCF Réseau (procédant de la fameuse « règle d’or », qui impose à SNCF Réseau le respect d’un ratio entre sa dette financière nette et sa marge opérationnelle).
Un décret n° 2019-1516 définit les règles de gestion domaniale applicables à la société SNCF Réseau et à SNCF Gares & Connexions, notamment en matière de déclassement, de cession (par exemple aux collectivités territoriales, en vertu des dispositions de l’article L. 2111-20-1 du code des transports) ou de transfert de gestion.
Autre enjeu essentiel pour l’ouverture à la concurrence, des précisions ont été apportées, par décret n° 2019-1450 du 24 décembre 2019 sur les conditions de transfert des ateliers de maintenance à la demande des autorités organisatrices qui le solliciteront pour l’exploitation des services conventionnés. Pour définir ceux des ateliers de maintenance dont le transfert pourra ainsi être sollicité par les autorités organisatrices, le VIII de l’article 21 de la loi du 27 juin 2018 avait retenu le critère de l’ « utilisation majoritaire » des ateliers de maintenance, en se référant au « volume d’activité consacré à la maintenance des matériels roulants affectés au contrat de service public, par rapport au volume d’activité consacré à la maintenance des matériels roulants ferroviaires des autres utilisateurs de cet atelier ». Le décret n° 2019-1450 vient préciser que ce volume d’activité s’apprécie au regard de « la durée d’utilisation des voies de cet atelier sur une période d’un an », mesurée « par la différence entre le moment d’arrivée effective et le moment de départ effectif de ce matériel roulant », tandis que la période d’un an considérée correspondra aux douze mois précédant la date de la demande formulée par l’autorité organisatrice. Alors que la pertinence de ce critère avait été mise en doute à plusieurs reprises par l’Autorité de régulation des transports (ART), tant du fait de la disponibilité de l’information que, sans le dire, de son possible détournement, c’est donc bien un critère de durée d’occupation qui a été retenu par le pouvoir réglementaire et qui pourrait donner lieu à une mise en œuvre délicate.
Enfin, un décret n° 2019-1583 est venu définir les règles relatives à l’élaboration du contrat entre l’Etat et SNCF Gares & Connexions, en cohérence avec les dispositions du code des transports, ce contrat ayant notamment pour objet d’assigner des objectifs ou obligations à Gares & Connexions, s’agissant de sa trajectoire financière, de la qualité de service rendu, de la rénovation des gares ou de l’accès des entreprises ferroviaires à ces dernières.
En dernier lieu, il convient de souligner également l’adoption de plusieurs textes relatifs aux conditions d’accès aux services conventionnés pour certaines catégories d’usagers (décrets n° 2019-1522 à n° 2019-1525) et un décret relatif aux conditions de saisine de l’ART sur la nomination, le renouvellement ou la révocation du dirigeant de la société SNCF Réseau.