La Cour de cassation rappelle une nouvelle fois que la présomption de réception tacite constituée par la prise de possession de l’ouvrage et le quasi-paiement du prix est écartée lorsque le maître d’ouvrage conteste la qualité des travaux.
En qualité de maîtres d’ouvrage, des particuliers ont confié la réfection de leur système de chauffage, d’installation d’une pompe à chaleur et la modification du réseau existant à la société CVC 37, assurée auprès de la Société mutuelle d’assurance du bâtiment et des travaux publics.
Une partie des travaux, à savoir l’installation de la pompe à chaleur, a été exécutée et payée, les parties ayant convenu que les travaux restants – consistant en la modification du réseau existant – seraient effectués ultérieurement.
Après la réalisation de cette première phase des travaux, l’installation de la pompe à chaleur a fonctionné sans donner pleine satisfaction aux maîtres d’ouvrage, et les parties se sont mises d’accord pour la réalisation des travaux restants.
Par la suite, les maîtres d’ouvrage ont fait constater l’état des travaux et, visiblement insatisfaits par leur qualité de réalisation, ont adressé à la société CVC 37 une sommation de procéder à l’adaptation du système de chauffage.
Puis, après expertise, les maîtres d’ouvrage ont assigné le liquidateur judiciaire de la société CVC 37 et son assureur en indemnisation des préjudices subis.
Cependant, la cour d’appel d’Orléans a refusé de faire droit à la demande des maîtres d’ouvrage de faire constater la réception tacite des travaux.
Les maîtres d’ouvrage se sont pourvus en cassation, considérant d’une part que la prise de possession de l’ouvrage, jointe au paiement quasi-intégral des travaux permettrait de caractériser la réception tacite, indépendamment de l’achèvement des travaux et de l’abandon de chantier. Or, en refusant de reconnaître la réception tacite malgré le paiement de 80 % du prix des travaux et que l’installation avait fonctionné durant l’hiver 2012-2013, les maîtres d’ouvrage soutiennent que la cour d’appel aurait méconnu l’article 1792-6 du code civil.
D’autre part, les maîtres d’ouvrage prétendent que l’achèvement des travaux ne serait pas une condition de la prise de possession et de la réception d’un ouvrage. Ainsi, l’abandon du chantier par l’entrepreneur avant la fin des travaux, le règlement du devis à hauteur de 80 %, ainsi que la prise de possession de l’ouvrage seraient suffisants pour caractériser la réception tacite de l’ouvrage. Les maîtres d’ouvrage soutiennent donc que les juges d’appel auraient, une nouvelle fois, violé l’article 1792-6 du code civil.
A la faveur d’un arrêt rendu le 1er avril 2021, publié au bulletin, la Cour de cassation précise que si les maîtres d’ouvrage ont effectivement pris possession de la première partie des travaux réalisés, ils ont contesté de manière constante la qualité des travaux exécutés et ont même sollicité une expertise judiciaire pour établir les manquements commis par la société CVC 37.
Dès lors, la volonté des maîtres d’ouvrage de prendre réception de l’ouvrage, malgré les réserves, s’analyse de manière équivoque. La cour d’appel a donc valablement pu en déduire l’absence de réception tacite à la date du paiement des premières factures de 2012.
Partant, la troisième chambre civile rejette le pourvoi.