Le code de l’urbanisme prévoit un certain nombre de cas dans lesquels l’autorité administrative peut, en dépit des règles d’urbanisme effectivement applicables, surseoir à statuer sur une demande d’autorisation dont la délivrance serait de nature à affecter une perspective future.
L’article L. 153-11 du code de l’urbanisme dispose ainsi qu’un sursis à statuer peut être opposé sur les demandes d’autorisation qui concernent des constructions, installations ou opérations de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan local d’urbanisme, dès lors qu’a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d’aménagement et de développement durable.
Plus généralement, ce sont les dispositions de l’article L. 424-1 du code qui définissent les différents cas dans lesquels un sursis peut être prononcé : c’est notamment le cas dans le périmètre d’une opération ayant fait l’objet d’une demande de déclaration d’utilité publique, dès la date d’ouverture de l’enquête publique préalable à celle-ci, c’est également le cas lorsque l’opération qui fait l’objet de la demande d’autorisation est de nature à affecter la réalisation d’une opération d’aménagement ou l’exécution de travaux publics.
S’agissant des sursis fondés sur l’affectation d’un futur document d’urbanisme, le Conseil d’Etat jugeait classiquement que, dans le cadre d’un recours dirigé contre la décision de l’autorité compétente de surseoir à statuer sur la demande d’autorisation, il n’était pas possible d’exciper de l’illégalité du document d’urbanisme prescrit (CE, 17 mars 1982, SCI Le Bas Chevincourt, req. n° 24962).
Dans une décision rendue le 22 juillet 2020, le Conseil d’Etat est revenu sur cette jurisprudence, pour admettre désormais la possibilité de se prévaloir, par la voie de l’exception, de l’illégalité du futur plan local d’urbanisme dont le contenu fonde la décision de sursis.
Le Conseil d’Etat y a jugé qu’« un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire qu’en vertu d’orientations ou de règles que le futur plan local d’urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l’installation ou l’opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution ».
Partant, c’est sans commettre d’erreur de droit que la cour administrative d’appel de Versailles avait, pour apprécier la légalité de la décision de sursis à statuer, examiné la légalité du futur plan local d’urbanisme.
Cette importante évolution, qui apparaît un contrepoids raisonnable à l’atteinte susceptible d’être portée aux droits des pétitionnaires par la mécanique du sursis à statuer, offre ainsi de nouvelles perspectives contentieuses dont on peut penser qu’elles seront étendues aux autres hypothèses dans lesquelles un sursis peut être prononcé.