Dans l’hypothèse où l’autorité concédante pourrait être amenée à commander des prestations supplémentaires en cours d’exécution du contrat sans toutefois être en mesure d’en déterminer le volume exact, elle est fondée à prévoir un critère reposant sur la comparaison des prix unitaires

Par un appel d’avis public à la concurrence en date du 11 février 2019, la commune de Saint-Julien-en-Genevois a lancé la passation d’une concession de services portant sur la mise à disposition, l’installation, la maintenance, l’entretien et l’exploitation commerciale d’abris voyageurs et de mobiliers urbains, qu’elle a attribué à la société Girod Médias.

 

La société JCDecaux France, candidate évincée, a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble d’un référé précontractuel, tendant d’une part à ce qu’il soit enjoint à la commune de lui communiquer les notes respectivement obtenues par son offre ainsi que par celle de l’attributaire, et d’autre part d’annuler la procédure de passation.

 

Le juge des référés du tribunal administratif a fait droit à cette demande par une ordonnance rendue le 15 novembre 2019.

 

Il a en effet relevé que le règlement de la consultation prévoyait la possibilité de commander des prestations supplémentaires, évaluées par le critère n° 8 « coûts supplémentaires pour la commune », pour lesquelles les candidats étaient invités à remplir le tableau annexé au bordereau des prix unitaires en indiquant un prix unitaire.

 

Néanmoins, en ne fixant aucune limite quantitative pour ces prestations supplémentaires, le juge des référés a jugé que la commune n’avait pas suffisamment défini l’étendue de ses besoins et s’était réservée une marge de choix discrétionnaire dans l’appréciation de ce critère, lequel ne garantissait donc pas l’égalité de traitement des candidats et la transparence de la procédure.

 

Cependant, par un arrêt rendu le 26 février 2020 et mentionné aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’État n’a pas suivi cette interprétation. Aux termes de celui-ci, la Haute juridiction a rappelé que l’autorité concédante, qui estime qu’elle pourra être placée dans la nécessité de commander des prestations supplémentaires au cours de l’exécution du contrat sans toutefois être en mesure d’en déterminer le volume exact, a la faculté de prévoir lors de la mise en concurrence un critère fondé sur la comparaison des prix unitaires proposés par les candidats pour ces prestations.

 

Or, en l’espèce, le tableau annexé au bordereau des prix unitaire permettait justement de comparer les prix unitaires des différentes offres.

 

Le Conseil d’Etat censure donc pour erreur de droit l’ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble et décide de régler l’affaire au fond, en application des dispositions prévues par l’article L. 821-2 du code de justice administrative.

 

Sans qu’il soit besoin de revenir sur l’ensemble des autres moyens développés par la société JCDecaux France, qui sont tous écartés par le Conseil d’État, il sera indiqué que ce dernier a validé la pondération du critère n° 8 à hauteur de 34%, estimant que la personne publique a la possibilité « d’attacher une importance particulière aux conditions financières dans lesquelles des prestations supplémentaires seraient susceptibles d’être commandées », sans risquer de commettre une erreur manifeste d’appréciation.

 

Et, pour finir, la Haute juridiction rejette également le moyen fondé sur l’offre anormalement basse de la société Girod Médias, au motif que le régime juridique applicable à de telles offres n’est pas applicable en tant que tel aux concessions.

 

CE, 26 février 2020, Commune de Saint-Julien-en-Genevois, req. n° 436428

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