En matière de marchés de travaux, en application de l’article 13.4.2 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) qui leur est applicable, le représentant du pouvoir adjudicateur doit notifier au titulaire du marché le décompte général avant la plus tardive des deux dates ci-après, soit quarante jours après la date de remise au maître d’œuvre du projet de décompte final par le titulaire, soit douze jours après la publication de l’index de référence permettant la révision du solde. Autrement, ce dernier peut, lui adresser une mise en demeure. Dans ce cas, lorsqu’il ne reçoit pas ledit décompte dans un délai de trente jours à compter de cette mise en demeure, le titulaire du marché peut « saisir le tribunal administratif compétent en cas de désaccord. ».
Le Conseil d’Etat, dans sa décision commentée Société Bonaud du 10 juin 2020, vient préciser que les stipulations de l’article 13.4.2 précité devaient être interprétées comme permettant au titulaire du marché, lorsque le pouvoir adjudicateur ne défère pas à la mise en demeure de notifier le décompte général, de saisir le tribunal administratif de conclusions tendant à ce que celui-ci établisse le décompte général, mais également de conclusions tendant au règlement du solde du marché.
Autrement dit, en cas d’inertie de ce pouvoir adjudicateur, il appartient au juge administratif d’établir le décompte général et donc le solde du marché – étant précisé que la production du décompte en cours d’instance ne fait pas perdre à la requête son objet :
« Il résulte de ces stipulations que lorsque le pouvoir adjudicateur, mis en demeure de notifier le décompte général, s’abstient d’y procéder dans le délai de trente jours qui lui est imparti, le titulaire du marché peut saisir le tribunal administratif d’une demande visant à obtenir le paiement des sommes qu’il estime lui être dues au titre du solde du marché. Dans l’hypothèse où la personne publique notifie le décompte général postérieurement à la saisine du tribunal, le litige conserve son objet et y a lieu pour le juge de le trancher au vu de l’ensemble des éléments à sa disposition, sans que le titulaire du marché soit tenu présenter de mémoire de réclamation contre ce décompte. »
La Haute juridiction précise, en outre, qu’aux termes de l’article R. 541-1 du code de justice administrative « le titulaire du marché peut obtenir du juge des référés qu’il ordonne au pouvoir adjudicateur le versement d’une indemnité provisionnelle et qu’il n’est pas tenu de saisir, par ailleurs, le juge du contrat d’une demande au fond. Dès lors, la saisine du juge des référés, sur le fondement des articles R. 541-1 et suivants du code de justice administrative, de conclusions tendant au versement d’une provision sur le solde du marché doit être regardée comme la saisine du tribunal administratif compétent au sens de l’article 13.4.2 du CCAG applicable aux marchés de travaux ».
Dans ces conditions, la saisine du juge des référés provision par le titulaire du marché peut être regardée comme la saisine du tribunal administratif compétent au sens de l’article 13.4.2 précité.
CE, 10 juin 2020, Société Bonaud, req. n° 436922 .