Par un arrêt du 11 mai 2022 publié au bulletin, le Cour de cassation a précisé sa jurisprudence relative au caractère applicable d’une clause de conciliation préalable obligatoire dans un contrat de maîtrise d’œuvre.
En l’espèce, en qualité de maître d’ouvrage, un particulier a confié à la société Neodomus, architecte, aux droits de laquelle vient la société Architecture milieu territoire 45, assurée par la Mutuelle des architectes français (la MAF), une mission de maîtrise d’œuvre en vue de la rénovation de sa maison d’habitation.
Le cahier des clauses générales du contrat d’architecte contenait, en son article G 10, une clause de conciliation préalable obligatoire, aux termes de laquelle en cas de litige entre elles portant sur l’exécution du contrat, les parties s’engageaient à saisir pour avis le conseil régional de l’ordre des architectes dont relève la société Neodomus, aux droits de laquelle vient la société Architecture milieu territoire 45 : « En cas de différend portant sur le respect des clauses du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l’ordre des architectes dont relève l’architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire. Cette saisine intervient sur l’initiative de la partie la plus diligente ».
Les travaux réalisés sous le contrôle du maître d’œuvre ont été réceptionnés avec réserves les 21 mars et 4 avril 2012. Consécutivement à la réception, des désordres sont survenus, de sorte qu’après expertise judiciaire, le maître d’ouvrage a assigné la société Neodomus, aux droits de laquelle vient la société Architecture milieu territoire 45, ainsi que son assureur, aux fins d’obtenir une indemnisation eu égard aux préjudices subis.
Par un arrêt rendu le 23 février 2021, la Cour d’appel d’Orléans a rejeté les demandes présentées par le maître d’ouvrage, faisant droit à la fin de non-recevoir opposée par les sociétés Architecture milieu territoire 45 et MAF sur le fondement de l’article G 10 du contrat de maîtrise d’œuvre. En effet, à suivre les juges d’appel, les demandes présentées par le maître d’ouvrage étaient irrecevables faute d’avoir saisi au préalable le conseil régional de l’ordre des architectes.
Saisi de ce contentieux par pourvoi formé par le maître d’ouvrage, la Cour de cassation rappelle, aux visas des articles 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1792 du code civil, que « la clause de saisine de l’ordre des architectes préalable à toute action judiciaire, en cas de litige sur le respect des clauses du contrat, ne peut porter que sur les obligations des parties au regard des dispositions de l’article 1134 du code civil et n’a donc pas vocation à s’appliquer dès lors que la responsabilité de l’architecte est recherchée sur le fondement de l’article 1792 du même code ».
Or, en l’occurrence, la Cour d’appel d’Orléans a jugé que la clause figurant à l’article G 10 du cahier des clauses générales du contrat d’architecte était applicable au cas d’espèce, alors que le maître d’ouvrage demandait réparation de désordres notamment sur le fondement de l’article 1792 du code civil.
La troisième chambre civile casse et annule l’arrêt déféré, considérant au contraire que la clause de conciliation préalable obligatoire instituée par le cahier des clauses générales du contrat d’architecte ne pouvait s’appliquer que dans l’hypothèse d’une action formée sur le fondement de la responsabilité contractuelle, et en aucun cas sur celui de la responsabilité décennale.
Cass., 3e civ., 11 mai 2022, n° 21-16023, publié au bulletin