La cristallisation des moyens applicable au contentieux de la légalité des permis de construire ne produit d’effet que lors de l’instance en cours

Par un arrêt rendu le 24 avril dernier, qui sera mentionné dans les tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat a précisé le régime de la cristallisation des moyens dans le cadre du contentieux des permis de construire.

L’article R.600-4 du code de l’urbanisme dans sa rédaction applicable au litige disposait que « saisi d’une demande motivée en ce sens, le juge devant lequel a été formé un recours contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager peut fixer une date au-delà de laquelle des moyens nouveaux ne peuvent plus être invoqués ».

Sur le fondement de ces dispositions, le Conseil d’Etat a précisé que « lorsqu’il considère qu’une affaire est en état d’être jugée, le juge peut, par ordonnance, fixer, dans le cadre de l’instance et avant la clôture de l’instruction, une date à compter de laquelle les parties ne peuvent plus soulever de moyens nouveaux. Le pouvoir ainsi reconnu au juge est limité à l’instance pendante devant la juridiction à laquelle il appartient. Son ordonnance perd son objet et cesse de produire ses effets avec la clôture de l’instruction dans le cadre de cette instance. Il s’ensuit que l’usage, avant cassation, de la faculté prévue par l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme est sans incidence sur la recevabilité des moyens que peuvent soulever les parties, après cassation et renvoi, à l’appui de leurs conclusions devant le juge du fond ».

En l’espèce, la Haute juridiction annule le jugement rendu par le Tribunal administratif de Versailles le 10 novembre 2017 en relevant deux erreurs de droit.

En effet, d’une part, les juges de première instance ont commis une première erreur de droit en considérant que les moyens nouveaux soulevés par les requérants étaient irrecevables alors qu’ils avaient été soulevés antérieurement à la date fixée par l’ordonnance instituant la cristallisation des moyens.

D’autre part, le Tribunal administratif avait rejeté les moyens nouveaux présentés par les requérants dans l’instance survenue sur renvoi après cassation. Or, « en rejetant les moyens nouveaux soulevés dans ces écritures au motif qu’ils avaient été présentés postérieurement au 30 janvier 2015, alors que, ainsi qu’il a été dit au point 3, les dispositions de l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme ne faisaient pas obstacle à ce que de tels moyens soient soulevés quand la procédure a été reprise à la suite de l’annulation et du renvoi prononcés par le Conseil d’Etat, le tribunal administratif de Versailles a entaché son jugement d’une [seconde] erreur de droit ».

CE, 24 avril 2019, Mme C. et M. F., req. n° 417175

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