Le contrôle exercé par le juge administratif sur la pondération des critères de jugement des offres est un contrôle restreint

Aux termes d’une décision rendue le 10 juin 2020, le Conseil d’Etat est venu préciser que le contrôle opéré par le juge administratif, s’agissant de la pondération des critères de jugement des offres, est un contrôle restreint.

En l’occurrence, le Ministre de la défense a lancé, selon une procédure adaptée, la passation d’un marché à bons de commande en vue de la réalisation de prestations de formation en achat public, cette consultation a été lancée sous l’empire du Code des marchés publics et était divisée en sept lots géographiques.

Deux candidats évincés à l’attribution du marché, la société S. et la société A., ont introduit une requête devant le Tribunal administratif de Rennes tendant à la condamnation de l’Etat à verser la somme de 218.400 euros au titre de la réparation du préjudice qu’elles estimaient avoir subi en raison de leur éviction de ce marché.

Les deux sociétés ont interjeté appel devant la Cour administrative d’appel de Nantes qui a annulé le jugement et condamné l’Etat à verser la somme de 4.800 euros tout en rejetant le surplus de leur requête d’appel.

La Cour administrative d’appel de Nantes avait en effet jugé que la pondération des critères de jugement retenue par le Ministre dans le cadre de cette consultation était irrégulière en ce qu’elle était « particulièrement disproportionnée ». L’acheteur public avait précisé que les offres étaient appréciées au regard d’un critère de valeur technique pondéré à hauteur de 90% et d’un critère tiré du prix pondéré à 10%.

L’Etat s’est toutefois pourvu en cassation à l’encontre de l’arrêt rendu.

Le Conseil d’Etat, après avoir rappelé les dispositions de l’article 53 du code des marchés publics, applicable en l’espèce, énonce que le choix de l’offre économiquement la plus avantageuse doit se faire en fonction de critères permettant d’apprécier la performance globale des offres au regard de ses besoins mais précise surtout que l’acheteur dispose toutefois d’une latitude certaine dans la pondération de ces critères :

« Le pouvoir adjudicateur détermine librement la pondération des critères de choix des offres. Toutefois, il ne peut légalement retenir une pondération, en particulier pour le critère du prix ou du coût, qui ne permettrait manifestement pas, eu égard aux caractéristiques du marché, de retenir l’offre économiquement la plus avantageuse »

Le contrôle opéré par le juge administratif est donc un contrôle restreint ayant pour objet de vérifier que la pondération retenue par l’acheteur n’ait seulement pas eu pour effet d’écarter l’offre économiquement la plus avantageuse au regard des caractéristiques du marché.

Le Conseil d’Etat considère, en l’occurrence, que la Cour administrative d’appel a dès lors commis une erreur de droit en jugeant que la pondération retenue par l’acheteur était « particulièrement disproportionnée », que ce dernier n’en avait pas établi la nécessité, et qu’elle conduisait à « neutraliser manifestement le critère prix ».

CE, 10 juin 2020, Ministre des armées, req. n°431194