L’arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 12 avril 2022 et mentionné dans les tables du recueil Lebon, illustre le fait que le juge administratif peut parfois apprécier strictement l’intérêt des associations de défense de l’environnement à agir à l’encontre des permis de construire.
En l’espèce, par arrêté du 12 août 2016, le maire de Noirmoutier-en-l’Ile a délivré un permis de construire une maison d’habitation et de démolir et reconstruire partiellement un garage. La légalité de cet arrêté a été déférée à la censure du tribunal administratif de Nantes par deux requérants, parmi lesquels l’association Vivre l’Ile 12/12.
Cependant, en cours d’instruction, l’association Vivre l’Ile 12/12 s’est désistée de sa requête, ce dont le tribunal administratif a donné acte, avant de produire un mémoire en intervention volontaire au soutien des conclusions de l’autre requérant, lequel ne s’était quant à lui pas désisté.
Au final, le tribunal administratif n’a pas admis l’intervention volontaire de l’association Vivre l’Ile 12/12 et a rejeté la requête aux fins d’annulation de l’arrêté du 12 août 2016. Saisie de ce contentieux par un appel formé par l’association Vivre l’Ile 12/12, la cour administrative d’appel de Nantes a non seulement annulé le jugement, mais de surcroît l’arrêté contesté.
Le pétitionnaire s’étant pourvu en cassation, le Conseil d’Etat a donc été amené à se prononcer sur la validité de l’intervention volontaire de l’association Vivre l’Ile 12/12.
Le Conseil d’Etat commence par rappeler le principe selon lequel un désistement a le caractère d’un désistement d’instance, sauf si le requérant entend formellement lui donner le caractère d’un désistement d’action. Ce faisant, la Haute Juridiction considère que le désistement de l’association Vivre l’Ile 12/12 ne l’empêchait pas d’intervenir ultérieurement à l’instance de façon volontaire pour soutenir la requête introduite par l’autre requérant.
En revanche, le Conseil d’Etat précise que la personne dont l’intervention a été autorisée en première instance n’est recevable à interjeter appel du jugement que sous réserve qu’elle aurait eu la qualité pour introduire elle-même le recours.
Or, ce n’est pas le cas de l’association Vivre l’Ile 12/12, dont les statuts ne l’autorisent pas expressément à agir à l’encontre des permis de construire :
« Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’association Vivre l’Ile 12/12 s’est donné pour objet, aux termes de l’article 3 de ses statuts, » d’assurer la protection de la nature et de l’environnement de l’île de Noirmoutier, de sauvegarder sa flore, sa faune, ses réserves naturelles, en tenant compte du milieu dont elles dépendent, de veiller au bon équilibre des intérêts humains, sociaux, culturels, scientifiques, économiques, sanitaires et touristiques « . En jugeant, au regard de cet objet statutaire, que l’association aurait eu qualité pour introduire elle-même un recours et était ainsi recevable à interjeter appel du jugement ayant rejeté la demande d’annulation du permis attaqué, la cour a inexactement qualifié les faits et commis une erreur de droit au regard des principes énoncés au point 3, un tel objet statutaire ne donnant pas à l’association un intérêt suffisant pour demander l’annulation du permis de construire en litige, qui autorise la construction d’une maison individuelle sur un terrain comportant déjà une construction, dans une zone elle-même urbanisée ».
Ainsi, jugeant que l’association Vivre l’Ile 12/12 n’était pas recevable à interjeter appel du jugement, le Conseil d’Etat annule pour erreur de droit l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Bordeaux.
CE, 12 avril 2022, M. J, req. n° 451778