Titulaires depuis 1988 de baux à construction stipulant une promesse de vente au profit des sociétés preneuses, ces dernières ont manifesté auprès des propriétaires leur intention d’acquérir les trois parcelles objet des baux et les constructions. Accusant réception d’une déclaration d’aliéner pour chacune des parcelles, le maire de la commune de Mandelieu-la-Naplouse a décidé, par arrêté du 20 janvier 2020, d’exercer son droit de préemption sur ces parcelles en vue de la réalisation d’une opération d’aménagement d’un pôle d’excellence de nautisme. Les acquéreurs évincés et les propriétaires ont saisi, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Nice d’une demande tendant à la suspension de l’exécution de cette décision.
Saisi d’un pourvoi en cassation à l’encontre des ordonnances du 9 juillet 2020 par lesquelles le juge des référés du Tribunal administratif de Nice a suspendu cette décision, le Conseil d’Etat annule les ordonnances pour des raisons de procédure puis règle l’affaire au titre des procédures de référé engagées.
Selon la Haute juridiction, la circonstance qu’une parcelle soit grevée d’un bail à construction ne fait pas, par elle-même, obstacle à l’exercice du droit de préemption en application des articles L. 210-1, L. 213-1 et L. 213-2 du code de l’urbanisme. Cependant, lorsque la préemption est exercée à l’occasion de la levée, par le preneur, d’une option d’achat lui permettant d’accepter la promesse de vente consentie par le bailleur « elle a pour effet de transmettre à l’autorité qui préempte ces parcelles la qualité de bailleur et, ce faisant, les obligations attachées à cette qualité, parmi lesquelles celle d’exécuter cette promesse de vente ».
Examinant les faits de l’espèce, le juge de cassation relève que « les sociétés SEETA et Port Inland ont manifesté, [dans les conditions fixées aux baux], leur intention d’acquérir les parcelles en cause ». Or, la décision de préemption de la commune, prise à l’occasion de l’aliénation réalisée en exécution de des stipulations des contrats de baux à construction, ne pouvait permettre de satisfaire à la nécessité, résultant de l’article L. 210-1 du code de l’urbanisme, d’être exercée en vue de la réalisation d’une action ou opération d’aménagement ou, comme elle le mentionnait en l’espèce dans ses motifs, de la constitution d’une réserve foncière pour la réalisation d’une telle action ou opération.
Le Conseil d’Etat en conclut qu’il existe en l’état de l’instruction un doute sérieux quant à la légalité de la décision de préemption du 20 janvier 2020. Puis, il considère « qu’il apparaît nécessaire, dans les circonstances de l’espèce, de prévoir que la suspension de l’arrêté du 20 janvier 2020 a pour effet, tant de faire obstacle au transfert de propriété et à la prise de possession des biens préemptés au bénéfice de la collectivité publique titulaire du droit de préemption que de permettre aux propriétaires et aux acquéreurs évincés de mener la vente à son terme ».
Ainsi, l’arrêté du maire de Mandelieu-la-Napoule du 20 janvier 2020 est suspendu.