Au nombre des procédures formalisées qui peuvent être mises en œuvre par un pouvoir adjudicateur pour la passation d’un marché public figure notamment la procédure avec négociation, qui lui permet, en vertu de l’article L. 2124-3 du code de la commande publique, de négocier les conditions du marché avec un ou plusieurs opérateurs économiques.
Les textes encadrent néanmoins strictement les hypothèses dans lesquelles il peut y être recouru. L’article 25 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, aujourd’hui codifié à l’article R. 2124-3 du code de la commande publique, énumérait ainsi les situations permettant d’y recourir, au nombre desquelles le cas où « le besoin ne peut être satisfait sans adapter des solutions immédiatement disponibles ». Comme d’autres hypothèses visées par le texte, issu de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 (art. 26, notamment), c’est au gré des applications de ce cas de figure par les juridictions administratives que sa consistance se précise.
Saisi en cassation à la suite de l’annulation, par le Tribunal administratif de Lyon, dans le cadre d’un référé précontractuel, de la procédure de passation d’un accord-cadre portant sur la réalisation de diagnostics techniques réglementaires avant démolition, relocation, vente et travaux par l’office public de l’habitat de la métropole de Lyon (Lyon Métropole Habitat), le Conseil d’Etat avait l’occasion de préciser quelque peu les contours de ce cas de figure.
L’accord-cadre considéré portait sur la réalisation de diagnostics immobiliers, sur un parc immobilier dont les caractéristiques induisaient une certaine dose de complexité organisationnelle pour le prestataire : il s’agissait, selon les termes de la décision, d’un parc « nombreux, disparate, comportant des logements tant individuels que collectifs, disséminé sur un grand nombre de communes, dont les dates de construction étaient variables ». Pour autant, ces caractéristiques ne rejaillissaient pas sur la nature même des prestations demandées, qui correspondaient à la réalisation de diagnostics réglementaires classiques, devant être réalisés selon des normes de conformité bien connues.
La question se posait donc à la Haute-juridiction de déterminer si une complexité d’ordre organisationnel ou méthodologique pouvait être regardée comme rendant nécessaire d’ « adapter des solutions immédiatement disponibles » au sens des textes susvisés et donc s’il fallait accepter de prendre en considération autre chose que la nature même des prestations demandées, au titre des « solutions immédiatement disponibles ».
Le Conseil d’Etat, dans une décision rendue le 7 octobre 2020, a répondu par la négative, jugeant qu’en dépit de la complexité organisationnelle ou méthodologique induite par les caractéristiques particulières du parc immobilier de l’acheteur public, les prestations concernées correspondaient à des prestations « connues et normalisées ». Autrement dit, le fait que les candidats aient à adapter leurs méthodes pour la prestation d’un service ne suppose pas pour autant « l’adaptation de solutions immédiatement disponibles ».
Il faut donc comprendre que les « solutions » visées par le texte s’entendent de la consistance même des services attendus par l’acheteur public et qu’ainsi, seuls les particularismes liés à la nature de ces services peuvent permettre de se prévaloir de ce cas de figure pour recourir à la procédure avec négociation.
Conseil d’Etat, 7 octobre 2020, Lyon Métropole Habitat, req. n° 440575