Par une décision du 19 juillet 2019, le Conseil d’Etat poursuit son adaptation du recours pour excès de pouvoir face à l’évolution des techniques administratives en appliquant la jurisprudence Fairvesta à un nouveau type d’acte dit de « droit souple ».
Dans l’affaire qui lui était soumise, la Haute Autorité pour la transparence dans la vie publique avait rendu publique la déclaration de patrimoine d’un député en l’accompagnant d’une appréciation constatant l’existence de manquements portant atteinte au caractère exhaustif, exact et sincère de la déclaration.
Il a considéré que cette appréciation constituait une prise de position publique de la part de cette autorité administrative et que nonobstant l’absence d’effets juridiques qu’elle produisait dans l’ordonnancement juridique, elle faisait grief au regard « des effets notables, notamment en termes de réputation, qui au demeurant sont susceptibles d’avoir une influence sur le comportement des personnes, et notamment des électeurs, auxquelles elle s’adresse » et devait dès lors ouvrir droit à l’exercice d’un recours pour excès de pouvoir pour ce même député.
Cette décision s’inscrit dans la continuité de la doctrine du Conseil d’Etat relative aux actes de « droit souple », formulée dans son étude annuelle de 2013, concrétisée ensuite au contentieux par la décision Fairvesta (CE Ass., 21 mars 2016, req. n° 368082), en vertu de laquelle de tels actes, en ce qu’ils peuvent influencer les comportements différemment des actes de « droit durs », c’est-à-dire par des effets non juridiques, relevant de la réputation et de la référence, doivent pouvoir être contestés par les justiciables concernés.
Si le juge administratif avait essentiellement été conduit, jusqu’ici, à appliquer cette jurisprudence aux actes des autorités de régulation, à la demande d’opérateurs économiques dont les intérêts étaient affectés par des actes de droit souple, l’arrêt du 19 juillet 2019 démontre que des requérants individuels peuvent également s’en saisir et que les « effets notables » qui justifient la justiciabilité de ces actes ne se limitent pas aux effets de nature économique.
CE Ass., 19 juillet 2019, Mme A, req. n°426389, publié au recueil.