CAA Nancy, 30 juillet 2024, Département du Jura, req. n° 22NC02501
Dans un arrêt rendu le 30 juillet 2024, la Cour administrative d’appel de Nancy a considéré que la juridiction administrative est incompétente pour connaitre de la méconnaissance des obligations figurant dans des lettres d’intention.
En l’espèce, le département du Jura et la société Connectic 39 ont signé une convention de concession de travaux et de service public afin d’établir et d’exploiter le réseau départemental de communications électroniques à haut débit. Dans le cadre de cette convention, les sociétés Altitude Infrastructure et Eiffage ont remis au pouvoir adjudicateur des lettres de garantie par lesquelles elles s’engagent :
– d’une part, à attribuer à la société concessionnaire les moyens et ressources nécessaires au respect des obligations de cette dernière au titre de la convention de concession ;
– d’autre part, à maintenir, et le cas échéant, adapter ces moyens au vu des besoins effectivement constatés dans le cadre de la concession.
A la suite de difficultés financières rencontrées par la société Connectic 39, le département du Jura a souhaité engager, sur le fondement de ces lettres de garantie, la responsabilité contractuelle des sociétés Altitude Infrastructure et Eiffage.
Dans un premier temps, le juge administratif rappelle qu’aux termes de l’article 2322 du code civil : « la lettre d’intention est l’engagement de faire ou de ne pas faire ayant pour objet le soutien apporté à un débiteur dans l’exécution de son obligation envers son créancier ».
A l’aune de cette disposition, la Cour précise que les lettres de garantie doivent être regardées comme des lettres d’intention dès lors que ces lettres qui « ne constituent ni un cautionnement ni une garantie automne (…), imposent aux garants un réel engagement, instaurent une obligation de faire à la charge des sociétés Altitude Infrastructure et Eiffage ».
Dans un second temps, le juge précise que ces lettres d’intention :
– « ne comportent aucune clause qui impliquerait, dans l’intérêt général, qu’elles relèvent du régime exorbitant des contrats administratifs » ;
– « n’ont pas pour objet l’exécution même d’un service public et ne font pas participer directement les garants à l’exécution soit de travaux publics soit à la mission de service public confiée à la société [concessionnaire] » ;
– « présentent un objet distinct et détachable de la convention de concession à laquelle elles sont annexées ».
En conséquence, la Cour administrative d’appel considère que les lettres d’intention présentées par les sociétés Altitude Infrastructure et Eiffage « constituent des actes de droit privé dont le seul juge judiciaire peut connaître ».
CAA Nancy, 30 juillet 2024, Département du Jura, req. n° 22NC02501