Le Conseil d’Etat est venu préciser que le juge du contrat, saisi d’un recours en contestation de la validité du contrat, peut, au regard des vices l’affectant, annuler un contrat alors même qu’il n’est pas saisi que d’une demande de résiliation.
En l’occurrence, la commune de S. a confié à la société M. une mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage et d’accompagnement juridique pour la construction et la gestion d’un crématorium.
M. A, candidat évincé à l’attribution de ce marché, a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d’une demande de résiliation du contrat conclu par la commune. Par un jugement du 6 juin 2017, le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de résiliation dudit contrat.
M.A a interjeté appel en vue de solliciter, d’une part, l’annulation du jugement rendu et, d’autre part,
la nullité ou, subsidiairement, la résiliation du marché litigieux.
Par un arrêt du 28 novembre 2019, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté l’appel formé par M.A en considérant, d’une part, que les conclusions tendant à ce que soit prononcé la nullité du marché étaient nouvelles en appel et, conséquemment, irrecevables et, d’autre part, qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à la résiliation du marché dès lors que son exécution était terminée.
Après avoir rappelé les principes issus de la jurisprudence Département de Tarn-et-Garonne (CE, 4 avril 2014, req. n°358994) et notamment l’office du juge du contrat saisi par un tiers, le Conseil d’Etat vient souligner que ce dernier dispose de l’ensemble des pouvoirs – qui sont définis par la décision précitée – et qu’il lui appartient d’en faire usage pour déterminer les conséquences des irrégularités du contrat qu’il a relevées alors même que le requérant n’a expressément demandé que la résiliation du contrat :
« Il résulte de ce qui précède que le juge du contrat saisi par un tiers de conclusions en contestation de la validité du contrat ou de certaines de ses clauses dispose de l’ensemble des pouvoirs mentionnés au point précédent et qu’il lui appartient d’en faire usage pour déterminer les conséquences des irrégularités du contrat qu’il a relevées, alors même que le requérant n’a expressément demandé que la résiliation du contrat. Par suite, en considérant que les écritures par lesquelles M. A… faisait valoir devant elle que les vices entachant le contrat étaient de nature à entraîner son annulation constituaient des conclusions nouvelles en appel et par suite irrecevables au motif qu’il n’avait demandé au tribunal administratif que la résiliation du contrat, alors que les conclusions de M. A… devaient être regardées dès l’introduction de la requête devant le tribunal comme contestant la validité du contrat et permettant au juge, en première instance comme en appel, si les conditions en étaient remplies, de prononcer, le cas échéant d’office, l’annulation du contrat, la cour administrative d’appel de Bordeaux a commis une erreur de droit ».
Le Conseil d’Etat considère ainsi que la Cour administrative d’appel de Bordeaux a commis une erreur de droit en considérant que les conclusions présentaient par M.A, au stade de l’appel, tendant à solliciter l’annulation du contrat étaient nouvelles et, par suite, irrecevables.
CE, 9 juin 2021, Conseil national des barreaux, req. n°438047