La commune demeure seule responsable des irrégularités commises par le commissaire enquêteur durant l’enquête publique préalable à la révision de son plan local d’urbanisme

Par un arrêt qui sera mentionné dans les tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat a considéré, le 13 mars 2019, qu’une commune dont le plan local d’urbanisme avait été annulé par le juge administratif en raison des irrégularités commises par le commissaire enquêteur lors de l’enquête publique est infondée à engager par la suite la responsabilité de l’Etat du fait des carences précisément commises par le commissaire enquêteur.

Sur le fondement des dispositions prévues par les articles L.123-6, L.123-10, R.123-19 du code de l’urbanisme dans leur rédaction alors applicable, ainsi que des articles L.123-3, L.123-4, L.123-14, R.123-10 et R.123-22 du code de l’environnement dans leur rédaction alors en vigueur, la Haute juridiction a rappelé ce qui suit : « le plan local d’urbanisme soumis à enquête publique est élaboré à l’initiative et sous la responsabilité de la commune. La mission du commissaire-enquêteur consiste à établir un rapport adressé au maire relatant le déroulement de l’enquête et examinant les observations recueillies et à consigner, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non au projet. Le commissaire enquêteur, qui conduit ainsi une enquête à caractère local, destinée à permettre non seulement aux habitants de la commune de prendre une connaissance complète du projet et de présenter leurs observations, suggestions et contre-propositions, mais également à l’autorité compétente de disposer de tous les éléments nécessaires à son information et ainsi de l’éclairer dans ses choix, doit être regardé comme exerçant sa mission au titre d’une procédure conduite par la commune. Si le commissaire enquêteur est susceptible de prendre en compte tous les éléments révélés par l’enquête publique, y compris ceux qui ne concernent pas directement la commune, il n’en exerce pas pour autant sa mission, comme le soutient la commune requérante, au nom et pour le compte de l’Etat. Le fait que la commune ne puisse ni procéder elle-même à sa désignation ni décider du montant de sa rémunération est destiné à garantir l’indépendance du commissaire enquêteur ainsi que son impartialité à l’égard de la commune, qui assume la charge des frais d’enquête, notamment le versement de son indemnité. Si, à la date des faits en cause, aucune procédure n’était prévue pour permettre au maire, constatant une irrégularité dans le rapport ou les conclusions du commissaire enquêteur, d’en saisir le président du tribunal administratif, il lui appartenait en revanche de ne pas donner suite à une procédure entachée d’irrégularités et d’en tirer les conséquences en demandant soit au commissaire enquêteur de corriger ces irrégularités soit de mettre en œuvre une nouvelle procédure en saisissant à nouveau le président du tribunal administratif pour qu’il procède à la désignation d’un nouveau commissaire enquêteur ».

En l’espèce, suivant l’annulation de la délibération par laquelle le conseil municipal de la commune de Villeneuve-le-Comte avait approuvé son plan local d’urbanisme par le Tribunal administratif de Melun, motifs pris des irrégularités commises par le commissaire-enquêteur dans l’examen des observations recueillies pendant l’enquête publique ainsi que dans la présentation de ses conclusions, la commune avait demandé au préfet la réparation du préjudice qu’elle estimait avoir subi en raison des fautes commises par le commissaire enquêteur. Tant le Tribunal administratif de Melun que la Cour administratif d’appel de Paris ont rejeté les prétentions de la commune.

En considérant que « la responsabilité de l’Etat ne pouvait être engagée en raison des irrégularités commises par le commissaire enquêteur lors de la mission qu’il a réalisée dans le cadre de l’élaboration du projet de plan local d’urbanisme de la commune », le Conseil d’Etat a jugé que les juges d’appel n’avaient commis aucune erreur de droit, et ce, quand bien même l’adoption du plan local d’urbanisme par la commune de Villeneuve-le-Comte serait une condition préalable à la réalisation du projet de Village-nature, lequel avait été classé par l’Etat « opération d’intérêt national » et « projet d’intérêt général ».

CE, 13 mars 2019, Commune de Villeneuve-le-Comte, req. n° 418170