La dénomination sociale d’un opérateur économique ne saurait, au seul motif que celle-ci est susceptible d’induire un risque de confusion avec un autre candidat à l’attribution du contrat, justifier son exclusion pour influence indue sur le fondement des articles L3123-8 et L3123-11 du Code de la commande publique

La dénomination sociale d’un opérateur économique ne saurait, au seul motif que celle-ci est susceptible d’induire un risque de confusion avec un autre candidat à l’attribution du contrat, justifier son exclusion pour influence indue sur le fondement des articles L3123-8 et L3123-11 du Code de la commande publique

Conseil d’Etat, 24 mars 2022, Cne de Ramatuelle, req. n°457733

Dans le cadre d’une consultation en vue de l’attribution d’une sous-concession de travaux et de service public balnéaire lancée par la commune de Ramatuelle en qualité de concessionnaire de la plage de Pampelonne, la société EPI plage de Pampelonne a été informée le 27 août 2021 que son offre était arrivée en deuxième position et que le contrat avait été attribué à la société EPI. La société EPI plage de Pampelonne, estimant que l’autorité concédante aurait dû exclure la société EPI de la procédure de passation, a saisi le juge des référés précontractuels afin d’obtenir l’annulation de la procédure de passation.

Par une ordonnance du 6 octobre 2021, le juge des référés du Tribunal administratif de Toulon a fait droit à ces demandes. En effet, selon ce dernier, l’autorité concédante aurait dû exclure la société EPI de la procédure de passation ou, à tout le moins, solliciter des informations sur le fondement de l’article L3123-11 du Code de la commande publique. Pour lui, « la dénomination sociale de la société EPI, attributaire pressentie du contrat de sous-concession au litige, créait « un grave risque de confusion » avec la société détenant l’hôtel du même nom, actionnaire unique de la société EPI plage de Pampelonne, également candidate ».

Pour mémoire, les disposition des articles L3123-8 et L3123-11 du code de la commande publique permettent à l’autorité concédante d’exclure de la procédure de passation d’un contrat de concession un opérateur économique qui a « entrepris d’influer indûment le processus décisionnel de l’autorité concédante ou d’obtenir des informations confidentielles susceptibles de leur donner un avantage indu lors de la procédure de passation du contrat de concession, ou fourni des informations trompeuses susceptibles d’avoir une influence déterminante sur les décisions d’exclusion, de sélection ou d’attribution. » Dans ce cadre, l’autorité concédante « doit le mettre à même de présenter ses observations, d’établir dans un délai raisonnable et par tout moyen qu’il a pris les mesures nécessaires pour corriger les manquements précédemment énoncés et, le cas échéant, que sa participation à la procédure de passation du contrat de concession n’est pas susceptible de porter atteinte à l’égalité de traitement. »

Saisi d’un pourvoi en cassation, le Conseil d’Etat se prononce sur les dispositions précitées en indiquant qu’elles permettent à l’autorité concédante d’exclure de la procédure de passation d’un contrat de concession une personne qui peut être regardée, au vu d’éléments précis et circonstanciés, comme ayant entrepris d’influencer la prise de décision de l’acheteur dans le cadre de la procédure de passation en cause ou dans le cadre d’autres procédures récentes de commande publique, si cette personne n’a pas établi, en réponse à la demande de l’acheteur, que son professionnalisme et sa fiabilité ne peuvent plus être mis en cause et que sa participation à la procédure n’est pas de nature à porter atteinte à l’égalité de traitement des candidats.

Examinant les faits de l’espèce, le Conseil d’Etat considère que le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a commis une erreur de droit et juge que « le choix par un opérateur économique d’une dénomination sociale ne saurait, au seul motif que celle-ci est susceptible d’induire un risque de confusion avec une autre société également candidate à l’attribution de la sous-concession en litige, justifier son exclusion sur le fondement des dispositions de l’article L. 3123-8 du code de la commande publique. »

Néanmoins, jugeant l’affaire au fond, la Haute juridiction a annulé la procédure en considérant que l’offre de la société EPI, faute de respecter les stipulations du cahier des charges techniques, était irrégulière et que, en omettant d’éliminer une offre qui ne respectant pas les exigences formulées dans les documents de la consultation conformément aux dispositions de l’article L3124-2 du Code de la commande publique, la commune de Ramatuelle a manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence.

Par conséquent, l’ordonnance du 6 octobre 2021 juge des référés est annulée et la procédure de passation de la sous-concession de la plage de Pampelonne est annulée au stade de l’examen des offres.

Conseil d’État, 7ème – 2ème chambres réunies, 24/03/2022, 457733 – Légifrance (legifrance.gouv.fr)