Le CHU de Pointe-à-Pitre / Abymes a confié à la société ACAOP, dirigée par M.J, une mission d’audit et d’assistance à maitrise d’ouvrage (AMO) pour la passation des marchés d’assurance du groupement hospitalier territorial de la Guadeloupe. Le 10 mai 2021, le CHU a lancé une consultation avec l’assistance de l’AMO et de son dirigeant pour la passation de ces marchés. Le 7 juin 2021, la société SHAM, candidate, a demandé au juge des référés en matière de secret des affaires d’interdire l’accès de l’AMO à l’ensemble des documents déposés par les candidats et de l’exclure de la consultation.
S’appuyant sur l’article R557-3 du Code de justice administrative au terme duquel le juge des référés peut, lorsqu’il est saisi aux fins de prévenir une atteinte imminente ou faire cesser une atteinte illicite à un secret des affaires, prescrire toute mesure provisoire et conservatoire proportionnée et ordonner l’ensemble des mesures mentionnées à l’article R152-1 du Code de commerce, le juge des référés du tribunal administratif de Guadeloupe a rendu une ordonnance en date du 9 juin 2021, enjoignant au CHU d’interdire par tout moyen l’accès à la société ACAOP à l’ensemble des documents déposés par les soumissionnaires et suspendu l’analyse des offres.
Saisi d’un pourvoi en cassation par le CHU, le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance du juge des référés.
Selon le juge de cassation, il est important de prendre en compte le fait de l’AMO intervient pour le compte de la personne publique et que, dans le cadre de l’exécution de ce marché, le dirigeant et le personnel de l’AMO sont tenus à une obligation professionnelle de confidentialité. Ainsi, en jugeant qu’il n’y avait pas lieu de prendre en compte cette obligation de confidentialité dans l’appréciation du risque d’une atteinte imminente au secret des affaires susceptible d’être imputable au centre hospitalier le juge des référés a commis une erreur de droit.
Examinant les faits de l’espèce, le Conseil d’Etat relève que les informations relatives au prix d’une offre, doivent être regardées, au stade de la procédure de passation, comme couvertes par le secret des affaires. Puis, il considère que la seule circonstance que le dirigeant de l’AMO ait des relations étroites avec une société concurrente du requérant ne suffit pas, par elle-même, à caractériser un risque d’une atteinte imminente au secret des affaires dès lors que l’AMO ainsi que son dirigeant et ses personnels sont tenus à une obligation contractuelle de confidentialité dans le cadre de leur mission d’assistance au maître de l’ouvrage.
Le Conseil d’Etat précise enfin qu’il est possible de faire valoir devant le juge du référé précontractuel tout manquement aux règles de publicité et de concurrence tenant en une violation par le pouvoir adjudicateur du secret commercial ou de l’impartialité à laquelle celui-ci est tenu.