L’action en démolition d’un ouvrage public irrégulièrement implanté n’est soumise à aucune règle de prescription

CE, 27 septembre 2023, Mmes D et B c/ Société Enedis, req. n° 466321, publié aux tables du recueil Lebon

A la faveur d’un arrêt rendu le 27 septembre 2023 publié aux tables du Recueil Lebon, le Conseil d’État est venu apporter des précisions concernant l’office du juge administratif lorsque ce dernier est saisi d’une demande tendant à ce que soit ordonnée la démolition d’un ouvrage public dont il est allégué, par un requérant qui en a demandé sans succès la démolition à l’administration, qu’il est irrégulièrement implanté.

Plus précisément, le Conseil d’Etat a considéré que, saisi d’une telle demande, il appartient au juge administratif, juge de plein contentieux, de déterminer en fonction de la situation de droit et de fait existante à la date à laquelle il statue, si l’ouvrage est irrégulièrement implanté, puis, si tel est le cas, de rechercher :

  • Tout d’abord, si eu égard notamment à la nature de l’irrégularité, une régularisation appropriée est possible ;
  • Ensuite et, dans la négative, en tenant compte de l’écoulement du temps, de prendre en considération, d’une part les inconvénients que la présence de l’ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence, notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d’assiette de l’ouvrage, d’autre part, les conséquences de la démolition pour l’intérêt général, et d’apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n’entraîne pas une atteinte excessive à l’intérêt général.

C’est dans ce cadre que, après avoir rappelé qu’aucun délai de prescription n’est applicable à l’action en démolition d’un ouvrage public empiétant irrégulièrement sur une propriété privée, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt de la Cour administrative de Versailles aux motifs que : […] en estimant qu’eu égard aux inconvénients causés à Mmes D… et B… par la présence des ouvrages sur leur propriété, leur démolition ne portait pas une atteinte excessive à l’intérêt général, malgré les coûts liés à l’enfouissement de la ligne et à la dépose du pylône et malgré les risques d’interruption du service de distribution d’électricité durant les travaux et alors que le temps écoulé depuis l’acquisition de la propriété supportant les ouvrages en cause était de nature à limiter l’importance des inconvénients allégués, la cour a inexactement qualifié les faits de l’espèce. »

CE, 27 septembre 2023, Mmes D et B c/ Société Enedis, req. n° 466321, publié aux tables du recueil Lebon