Le fait que le marché public soit défini comme un « contrat à titre onéreux » ne constitue pas une base légale permettant de rejeter une offre dont le prix est de zéro euro

Dans cette espèce, un Ministère slovène a publié un avis de marché, découpé en deux lots, pour la passation d’un marché public portant sur l’accès à un système informatique juridique pour une durée de 24 mois. La valeur estimée de ce marché avait été déterminée à hauteur de 39 959,01 euros par l’acheteur.

La société T. a remis une offre pour le premier lot en proposant toutefois un prix de zéro euro.

Par une décision en date du 11 janvier 2019, le Ministère a informé la société T. du rejet de son offre au motif que le prix final de son offre est de zéro euro, ce qui, selon l’acheteur, était contraire aux règles des marchés publics.

La société T. a saisi le Ministère d’une demande de révision de sa décision portant rejet de son offre. Le Ministère a toutefois rejeté sa demande tout en renvoyant l’affaire devant la juridiction de renvoi compétente.

La juridiction saisie dudit litige a décidé de surseoir à statuer et de poser plusieurs questions préjudicielles à la CJUE.

Une des questions préjudicielles posée à la CJUE était de savoir d’interpréter l’article 2, paragraphe 1, point 5, de la directive 2014/24 en ce sens qu’il constitue une base légale de rejet d’une offre à un prix de zéro euro.

On rappellera en effet que l’article en question définit la notion de marché public comme un « contrat écrit conclu à titre onéreux entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et ayant pour objet l’exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services ».

A l’appui de son raisonnement, la CJUE relève notamment que « l’article 2, paragraphe 1, point 5, de la directive 2014/24 ne saurait constituer une base juridique susceptible de fonder le rejet d’une offre proposant un prix de zéro euro. Dès lors, cette disposition ne permet pas d’écarter automatiquement une offre soumise dans le cadre d’un marché public, telle qu’une offre au prix de zéro euro, par laquelle un opérateur propose de fournir au pouvoir adjudicateur les travaux, les fournitures ou les services que celuici souhaite acquérir sans demander de contrepartie ».

Plus encore, la CJUE souligne que, dans une telle hypothèse, et dans la mesure où une offre au prix de zéro euro pourrait être qualifiée d’offre anormalement basse, il incombe à l’acheteur de mettre en œuvre les la procédure prévue par l’article 69 de la directive 2014/24 et qui tend à détecter l’existence d’une potentielle offre anormalement basse.

La CJUE retient en effet qu’en application des dispositions de l’article 69 de la de la directive 2014/24, l’acheteur ne pourra automatiquement rejeter une offre au seul motif que son prix est de zéro euros sans avoir a minima obtenu des explications de la part de l’opérateur économique.

Partant, à la question de savoir si la notion même de marché public, telle que définie par la directive 2014/24, permet de rejeter directement une offre financière à hauteur de zéro euro, la Cour répond ainsi que l’article 2 paragraphe 1er  « doit être interprété en ce sens qu’il ne constitue pas une base légale de rejet de l’offre d’un soumissionnaire dans le cadre d’une procédure de passation de marché public, au seul motif que le prix proposé dans l’offre est de zéro euro ».

CJUE, 10 septembre 2020, Tax-Fin-Lex d.o.o., C-367/19

 

 

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