Le Conseil d’Etat a eu l’occasion, aux termes d’un arrêt en date du 27 février 2019, de revenir sur les pouvoirs du mandataire d’un groupement dans le cadre d’un contentieux quasi délictuel dirigé contre d’autres participants à l’opération de construction.
La Région Nord Pas De Calais avait confié, dans le cadre du chantier de construction de son nouveau siège, le lot gros œuvre structure au groupement composé des sociétés Sogea Nord et Rabot Dutilleul Construction.
Suite à l’accident survenu du fait de l’explosion d’une bouteille de gaz au siège du nouvel hôtel de Région, le groupement a souhaité obtenir indemnisation des préjudices subis sur le fondement d’une action quasi-délictuelle dirigée contre le titulaire du lot « étanchéité-toiture-terrasse-jardin », et contre le contrôleur technique.
C’est dans ce contexte que le Conseil d’Etat a eu l’occasion de se prononcer tant sur les conclusions présentées par le mandataire pour le compte de l’ensemble des membres du groupement, que sur les conclusions présentées par les membres du groupement, en leur nom propre.
S’agissant des conclusions présentées par le mandataire du groupement, pour l’ensemble de ses membres, le Conseil d’Etat précise que « si les entreprises (…) doivent être regardées comme s’étant donné mandat mutuel de se représenter pour tous les actes administratifs et techniques relatifs à l’exécution de ce marché dans le cadre des relations contractuelles entre le maître de l’ouvrage et les entreprises signataires du marché, ces mêmes entreprises ne sauraient être regardées comme s’étant donné un tel mandat pour engager une action quasi-délictuelle à l’encontre d’une autre entreprise, y compris lorsqu’elle participe à la même opération de travaux publics ». Aussi le Conseil d’Etat considère-t-il que la société Sogea Nord ne tirait pas de sa qualité de mandataire du groupement conjoint et solidaire un intérêt à engager au nom de celui-ci une action quasi-délictuelle à l’encontre d’autres constructeurs.
Le Conseil d’Etat écarte ensuite l’argumentation selon laquelle la demande de la société Sogea Nord aurait été présentée au nom de la société en participation qui avait été constituée avec la société Rabot Dutilleul, et ce dès lors que les stipulations des statuts de ladite société en participation ne prévoyaient pas une telle représentation.
Les conclusions présentées par le mandataire du groupement, au nom des membres le composant sont donc considérées comme étant irrecebales.
Se penchant ensuite sur les conclusions présentées par les sociétés membres du groupement, en leur nom propre, le Conseil d’Etat, constatant que la société Sogea Nord avait présenté « une demande globale d’indemnisation au bénéfice de l’ensemble des membre du groupement, qui n’est pas doté de la personnalité morale, sans opérer de distinctions entre les préjudices effectivement subis par chaque entreprise concernée », estime que les requérantes n’avaient pas justifié leurs préjudices, l’article 10 des statuts de leur société en participation, relatif à la répartition des recettes et des pertes ne pouvant permettre une individualisation des préjudices.
CE, 27 février 2019, Société Sogea Nord et autres, req. n°416678