Manque à ses obligations de mise en concurrence l’autorité concédante qui rejette une candidature comme incomplète en ne tenant compte que de la seconde transmission

Manque à ses obligations de mise en concurrence l’autorité concédante qui rejette une candidature comme incomplète en ne tenant compte que de la seconde transmission

Dans un arrêt du 20 décembre 2021, le Conseil d’Etat considère que l’envoi d’un document complémentaire ne peut se substituer à un dossier de candidature transmit antérieurement

Dans cette affaire, la commune de Cavalaire-sur-Mer a lancé une procédure de passation d’une délégation de service public pour l’exploitation de lots de plages. La date et l’heure limite pour les dépôts des candidatures était fixé au 17 mai 2021 à 17H.

Le 11 mai 2021, la société TDS a transmis sur le profil d’acheteur sa candidature puis, par pli séparé du 16 mai 2021, une pièce complémentaire. Se fondant sur l’article R.2151-6 du code de la commande publique, la commune n’a ouvert que ce dernier pli et la commission de délégation de service public a rejeté cette candidature au motif qu’elle était incomplète.

Considérant que l’autorité concédante avait manqué à ses obligations de mise en concurrence, la société TDS a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon d’ordonner à la commune de Cavalaire-sur-Mer de procéder à un nouvel examen et à un nouveau classement des offres.

Par ordonnance n°2101596 du 5 juillet 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande sans avoir répondu au moyen tiré de ce que la commune ne pouvait opposer une règle selon laquelle seul le dernier envoi était pris en compte.

La société TDS a saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation.

 

Les dispositions de l’article R2151-6 du Code de la commande publique n’ont pas pour effet de conduire à regarder toute transmission complémentaire comme étant systématiquement une nouvelle offre

L’article R 2151-6 du code de la commande publique dispose que le soumissionnaire transmet son offre en une seule fois. Si plusieurs offres sont successivement transmises par un même soumissionnaire, seule est ouverte la dernière offre reçue par l’acheteur dans le délai fixé pour la remise des offres.

Le Conseil d’Etat relève, d’une part, que ces dispositions propres aux marchés publics ne sont pas applicables à la passation des concessions. D’autre part, la Haute Juridiction fait une lecture pragmatique de cet article en relevant qu’il n’a pas pour effet de conduire à regarder toute transmission comme une nouvelle offre.

L’autorité concédante doit apprécier la teneur de la seconde transmission. Un document complémentaire faisant l’objet d’un second pli ne peut être raisonnablement regardé comme se substituant au dossier de candidature transmis antérieurement.

Le Conseil d’Etat écarte l’application du guide d’utilisation de la plateforme informant précisément les candidats que  » si vous devez modifier ou rajouter une pièce à votre réponse déjà déposée : tout déposer à nouveau et au complet car le dernier envoi prévaut !!! » et auquel le règlement de la consultation renvoyait.

Il juge que ce seul renvoi « ne pouvait, en tout état de cause, dispenser l’autorité concédante de constater que la seconde transmission ne comportait qu’un document et ne pouvait être raisonnablement regardée comme se substituant au dossier de candidature transmis antérieurement. Par suite, la société TDS est fondée à soutenir qu’en rejetant sa candidature comme incomplète en ne tenant compte que de cette seconde transmission, la commune de Cavalaire-sur-Mer a manqué à ses obligations de mise en concurrence et que ce manquement l’a lésée ».

Par suite, le Conseil d’Etat annule l’ordonnance du juge des référés et enjoint à la commune de Cavalaire-sur-Mer de reprendre la procédure au stade de l’examen des candidatures en tenant compte de la candidature que la société TDS lui a transmise le 11 mai 2021.

 

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000044588613?init=true&page=1&query=454801&searchField=ALL&tab_selection=all