Pour bénéficier de la garantie d’assurance dommages-ouvrage, le maître d’ouvrage ne peut, sauf exception, se dispenser de mettre en demeure l’entrepreneur d’exécuter ses obligations contractuelles

Pour bénéficier de la garantie d’assurance dommages-ouvrage, le maître d’ouvrage ne peut, sauf exception, se dispenser de mettre en demeure l’entrepreneur d’exécuter ses obligations contractuelles

Cass., 3e civ., 7 septembre 2022, n° 21-21382

Par un arrêt du 7 septembre 2022 publié au bulletin, la Cour de cassation a rappelé les conditions d’application de l’article L. 242-1 du code des assurances et est plus précisément revenue sur la formalité relative à la mise en demeure de l’entrepreneur défaillant.

En l’espèce, en cours de chantier, le maître d’ouvrage d’une opération de construction de logement a résilié pour manquement à ses obligations contractuelles le marché du constructeur chargé de l’exécution des lots gros œuvre et chauffage-plomberie. Ledit constructeur a ensuite fait l’objet d’une liquidation judiciaire.

Cependant, se plaignant non seulement de désordres mais également de trop-versés à l’entrepreneur, le maître d’ouvrage a assigné le maître d’œuvre, l’assureur de ce dernier, ainsi que l’assureur dommages-ouvrage en indemnisation de ses préjudices.

Ayant vu ses demandes formées à l’encontre de l’assureur dommages-ouvrage rejetées au motif du défaut de mise en demeure adressée à l’entrepreneur préalablement à la résiliation de son contrat, le maître d’ouvrage s’est pourvu en cassation, en faisant notamment valoir :

  • Qu’il appartenait au maître d’œuvre de mettre en demeure l’entrepreneur, en vertu du mandat qui lui avait été conféré par le maître d’ouvrage ;
  • Qu’il n’appartenait pas personnellement au maître d’ouvrage d’adresser la mise en demeure à l’entrepreneur ;
  • Et, en tout état de cause, que la formalité de la mise en demeure n’était pas requise en l’occurrence, dans la mesure où l’entrepreneur a fait l’objet d’une liquidation judiciaire.

Saisie de ce pourvoi, la Troisième chambre civile a opéré un raisonnement en trois temps en précisant que :

  • Premièrement, le contrat de maîtrise d’œuvre ne contenait aucun mandat exprès à l’effet d’adresser aux entreprises défaillantes une mise en demeure avant résiliation du contrat de travaux ;
  • Deuxièmement, la mise en demeure devant impérativement être adressée à l’entrepreneur avant la résiliation du marché de travaux doit émaner du maître d’ouvrage ou de son mandataire ;
  • Troisièmement, en application de l’article L. 242-1 du code des assurances, la garantie de l’assureur dommages-ouvrages n’est due, pour les dommages apparus avant la réception de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs sur le fondement de l’article 1792 du code civil, que si, après une mise en demeure restée infructueuse, le marché de travaux conclu avec l’entrepreneur est résilié pour inexécution de ses obligations.

Il est vrai, toutefois, que le maître de l’ouvrage peut se dispenser de cette formalité lorsqu’elle s’avère impossible ou inutile, notamment en cas de cessation de l’activité de l’entreprise ou de liquidation judiciaire emportant résiliation du marché de travaux.

Mais, en l’occurrence, le maître d’ouvrage a résilié le marché de travaux de l’entrepreneur sans mise en demeure préalable et ce, plusieurs mois avant la liquidation judiciaire de ce dernier. Dès lors, les conditions d’application de la garantie d’assurance dommages-ouvrage avant réception n’étaient pas réunies.

En conséquence, la Cour de cassation rejette le pourvoi.

Cass., 3e civ., 7 septembre 2022, n° 21-21382