Le Conseil d’Etat vient préciser le contenu d’un mémoire en réclamation contestant le décompte général du marché adressé par le titulaire dudit marché au pouvoir adjudicateur.
Dans l’affaire commentée, une commune avait confié à une société la réalisation des réseaux scénographiques dans le cadre de la restructuration de la maison de la culture MC 93, pour un montant de 1 139 620,98 euros.
A la suite de retards et de difficultés dans l’exécution des travaux, cette société a adressé à la commune une demande de rémunération complémentaire.
La commune lui a alors notifié deux projets de décomptes généraux du marché que la société a décidé de contester par une lettre. La commune n’ayant pas donné suite à cette lettre, la société a saisi le tribunal administratif de Montreuil d’une demande indemnitaire.
Par un jugement, le tribunal administratif de Montreuil a toutefois rejeté la demande formée par la société.
Par un arrêt du 15 juin 2020 contre lequel celle-ci se pourvoit en cassation, la cour administrative d’appel de Versailles a rejeté l’appel formé par la société contre ce jugement en considérant que la lettre de contestation du décompte général qui exposait l’un des motifs de sa contestation par référence à un courrier antérieur qui n’était pas joint à son envoi ne pouvait être regardée comme remplissant les exigences énoncées à l’article 50.1.1 du CCAG Travaux 2009.
Pour apprécier la recevabilité d’une demande de contestation d’un décompte général, le Conseil d’Etat rappelle qu’aux termes de l’article 50 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux de 2009) : « Si un différend survient entre le titulaire et le maître d’œuvre, sous la forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, ou entre le titulaire et le représentant du pouvoir adjudicateur, le titulaire rédige un mémoire en réclamation ».
Dans son mémoire en réclamation, « le titulaire expose les motifs de son différend, indique, le cas échéant, les montants de ses réclamations et fournit les justifications nécessaires correspondant à ces montants. (…) Le mémoire reprend, sous peine de forclusion, les réclamations formulées antérieurement à la notification du décompte général et qui n’ont pas fait l’objet d’un règlement définitif ».
Il en conclut de manière encore plus extensive qu’un « un mémoire du titulaire du marché ne peut être regardé comme une réclamation au sens des stipulations précitées que s’il comporte l’énoncé d’un différend et expose, de façon précise et détaillée, les chefs de la contestation en indiquant, d’une part, les montants des sommes dont le paiement est demandé et, d’autre part, les motifs de ces demandes, notamment les bases de calcul des sommes réclamées ».
En outre, « si ces éléments ainsi que les justifications nécessaires peuvent figurer dans un document joint au mémoire, celui-ci ne peut pas être regardé comme une réclamation lorsque le titulaire se borne à se référer à un document antérieurement transmis au représentant du pouvoir adjudicateur ou au maître d’œuvre sans le joindre à son mémoire ».
Dans ces conditions, il était clair que la lettre de contestation du décompte général envoyé à la commune et qui exposait l’un des motifs de sa contestation par référence à un courrier antérieur qui n’était pas joint à son envoi ne pouvait être regardée comme remplissant les exigences énoncées à l’article 50.1.1 du CCAG Travaux.
CE, 27 septembre 2021, Société Amica, req. n° 442455.