Référé instruction ou expertise permettant d’évaluer le préjudice : en l’absence manifeste de fait générateur, de préjudice ou de lien de causalité, la demande doit être rejetée pour défaut d’utilité

Référé instruction ou expertise permettant d’évaluer le préjudice : en l’absence manifeste de fait générateur, de préjudice ou de lien de causalité, la demande doit être rejetée pour défaut d’utilité

CE, 27 juillet 2022, Mme D. c/ Commune de Fréjus, req. n° 459159, publié aux tables du Recueil Lebon

Dans une décision du 27 juillet 2022 à paraître aux tables du Recueil Lebon, le Conseil d’Etat est venu légèrement modifier les conditions devant être réunies pour qu’un requérant puisse solliciter du juge des référés que celui-ci ordonne, sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative, une mesure d’instruction ou d’expertise permettant d’évaluer le préjudice invoqué.

La haute juridiction précise que « L’utilité d’une mesure d’instruction ou d’expertise qu’il est demandé au juge des référés d’ordonner sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d’une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d’autres moyens et, d’autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l’intérêt que la mesure présente dans la perspective, d’un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d’expertise permettant d’évaluer un préjudice, en vue d’engager la responsabilité d’une personne publique, en l’absence manifeste, en l’état de l’instruction, de fait générateur, de préjudice ou de lien de causalité entre celui-ci et le fait générateur. ».

Autrement dit – et il n’y a pas de changement à relever sur ces points par rapport à la jurisprudence antérieure – pour ordonner une mesure d’expertise ou d’instruction il appartient au juge des référés d’apprécier cette demande :

d’une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d’autres moyens ;

d’autre part, au regard de l’intérêt que la mesure présente dans la perspective d’un litige principal, actuel ou éventuel, auquel la mesure est susceptible de se rattacher (CE, 14 février 2017, Mme Bernard, req. n° 401514, mentionné aux tables du recueil Lebon) ;

Toutefois, et c’est là que se trouve la différence de formulation, le juge des référés ne peut faire droit à une demande d’expertise permettant d’évaluer un préjudice, en vue d’engager la responsabilité d’une personne publique « en l’absence manifeste, en l’état de l’instruction, de fait générateur, de préjudice ou de lien de causalité entre celui-ci et le fait générateur. ».

En effet, dans ce cas précis, la mesure sollicitée ne saurait être regardée comme utile.

A contrario, et toujours dans le cadre de l’affaire commentée, le Conseil d’Etat a considéré que le simple fait que l’existence même d’un fait générateur « ne pouvait être tenue comme suffisamment probable » ne saurait suffire à ôter tout caractère utile à la mesure d’expertise puisqu’: « En statuant ainsi, alors qu’il ne pouvait rejeter une telle demande pour défaut d’utilité qu’en l’absence manifeste de fait générateur, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit. »

CE, 27 juillet 2022, Mme D. c/ Commune de Fréjus, req. n° 459159, publié aux tables du Recueil Lebon