Résiliation du contrat de délégation de service public Autolib’ : articulation entre le défaut d’intérêt économique et la faute du délégataire

Cour administrative d’appel de Paris, 21 février 2025, Société Autolib’, n° 24PA00645

Dans le cadre du contentieux de la résiliation de la convention de délégation de service public pour la mise en place, la gestion et l’entretien d’un service d’automobiles électriques en libre-service et d’une infrastructure de recharge de véhicules électriques « Autolib’ »), le délégataire demandait le versement d’une indemnité totale de 233,7 millions d’euros au titre du défaut d’intérêt économique et celui de la résiliation de la convention.

La Cour donne partiellement droit à sa demande, d’abord sur le terrain du régime des biens de retours et celui des coûts de résiliation des sous-contrats conclus pour l’exécution du contrat principal. Ensuite et surtout, elle juge que ne constituaient une libéralité :

  • ni la prise en charge des pertes d’exploitation prévues excédant 60 millions d’euros au terme de la concession qui « a vocation à être remboursé par le concessionnaire, ou à être réévalué, afin que le montant effectivement versé par le concédant à l’issue de la concession corresponde aux pertes réellement subies par le concessionnaire au-delà de 60 millions d’euros.» Pour la Cour, « ces stipulations n’instaurent ainsi pas une indemnisation excédant le montant du préjudice subi par le concessionnaire. » ;
  • ni « l’indemnisation (…) des pertes d’exploitation de la concession supérieures à 60 millions d’euros à la date de la résiliation (…) « le montant du préjudice subi par le concessionnaire, correspondant, en l’espèce, aux dépenses qu’il a exposées pour la concession et qui n’ont pas été couvertes par la compensation qui lui aurait été versée si le contrat n’avait pas été résilié.»

La Cour relève toutefois ici que si les manquements du délégataire ne sont pas à l’origine du défaut d’intérêt économique de la concession, lequel « est essentiellement dû à une prévision de chiffre d’affaires excessivement optimiste lors de son lancement », les parties ont tardé à réagir aux difficultés de la concession, de sorte qu’en agissant ainsi, le délégataire « a privé (le syndicat) de la possibilité de décider, à cette date, la résiliation de la concession pour défaut d’intérêt économique ». La société délégataire ne peut ainsi prétendre à l’indemnisation du déficit cumulé de la concession excédant 60 millions d’euros que sur la durée n’excédant pas celle à partir de laquelle son comportement causait la réalisation de son préjudice.

Cour administrative d’appel de Paris, 21 février 2025, Société Autolib’, 24PA00645