S’écarte de son office le juge des référés précontractuel qui substitue sa propre appréciation des mérites des offres à celle du pouvoir adjudicateur

S’écarte de son office le juge des référés précontractuel qui substitue sa propre appréciation des mérites des offres à celle du pouvoir adjudicateur

Conseil d’Etat, Toulouse Métropole c/Société Philip Frères, 18 février 2022, req. n°457578

En l’espèce, la société Philip Frères classée en deuxième position a saisi le juge des référés précontractuel afin d’obtenir l’annulation de la décision d’attribution à la société Agri Sud-Ouest du marché de prestations de fauchage et de débroussaillage des dépendances des routes métropolitaines et afin qu’il soit enjoint à l’acheteur, Toulouse Métropole, de reprendre dans un délai d’un mois la procédure au stade de l’examen des offres.

Par une ordonnance du 30 septembre 2021, le juge des référés du Tribunal administratif de Toulouse a fait droit à ces demandes. Il a constaté que Toulouse Métropole avait attribué à l’offre de la société Agri Sud-Ouest la note maximale à un sous-critère de la valeur technique au motif que son offre prévoyait la désinfection du matériel entre chaque arbre et a attribué une note plus faible à la société Philip Frères au motif qu’elle ne comportait pas un tel engagement. Puis, le juge a estimé que la mise en œuvre de telles mesures était « difficilement concevable » et que l’acheteur ne pouvait se fonder sur cet engagement pour noter les offres.

Saisi d’un pourvoi en cassation, le Conseil d’Etat rappelle qu’il n’appartient pas au juge du référé précontractuel, qui doit seulement se prononcer sur le respect, par le pouvoir adjudicateur, des obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation d’un contrat, de se prononcer sur l’appréciation portée sur la valeur d’une offre ou les mérites respectifs des différentes offres. Il lui appartient, en revanche, lorsqu’il est saisi d’un moyen en ce sens, de vérifier que le pouvoir adjudicateur n’a pas dénaturé le contenu d’une offre en méconnaissant ou en altérant manifestement les termes et procédé ainsi à la sélection de l’attributaire du contrat en méconnaissance du principe fondamental d’égalité de traitement des candidats

Puis, la Haute juridiction considère qu’en portant une appréciation sur la valeur des offres, en estimant « qu’il était ²difficilement concevable² que de telles mesures de désinfection soient mises en œuvre » et en déduisant « que Toulouse Métropole ne pouvait se fonder sur cet engagement pour noter les offres au titre du sous-critère», le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a méconnu son office.

Il n’appartient pas au juge du référé précontractuel de substituer sa propre appréciation des mérites des offres à celle du pouvoir adjudicateur. Réglant l’affaire au titre de la procédure, le Conseil d’Etat conclut « que la société Philip Frères ne peut donc utilement soutenir que Toulouse Métropole n’aurait pas dû tenir compte, dans la notation du sous-critère de l’engagement tenant à la désinfection des outils et engins entre chaque arbre, dont elle considère qu’il serait irréaliste ». La demande présentée par la société Philip Frères est rejetée et  l’ordonnance du juge des référés précontractuel annulée.

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000045190427?init=true&page=1&query=&searchField=ALL&tab_selection=cetat