Sursis à statuer en vue de la régularisation d’une autorisation d’urbanisme : l’invitation par le juge à produire des observations et la communication de ces observations aux parties n’ont pas pour effet de rouvrir une instruction déjà close

Sursis à statuer en vue de la régularisation d’une autorisation d’urbanisme : l’invitation par le juge à produire des observations et la communication de ces observations aux parties n’ont pas pour effet de rouvrir une instruction déjà close

CE, 10 octobre 2022, Société Horizon et autre c/ commune de Thonon-Les-Bains, req. n° 455573, publié aux tables du recueil Lebon

A la faveur d’une décision du 10 octobre 2022 à paraître aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat est venu préciser que, lorsqu’en application des dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, le juge administratif invite les parties à produire des observations, ni cette invitation, ni la communication aux parties des observations reçues en réponse à cette invitation n’ont, par elles-mêmes, pour effet de rouvrir l’instruction si celle-ci était close.

Plus précisement, dans cette affaire, le Maire de Thonon-les-Bains a, le 20 avril 2020, délivré à société Immo Léman un permis de construire portant sur l’édification d’un immeuble de 8 logements.

Après le rejet de leur requête tendant à l’annulation pour excès de pouvoir du permis de construire précité, la société Immo Léman et autre se sont pourvus en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 14 juin 2022 en soutenant, notamment, que ce jugement serait entaché d’irrégularité en l’absence de clôture d’instruction ou d’information en ce sens.

Pour mémoire, il importe de rappeler qu’il résulte de :

– l’article R. 611-7 du code de justice administrative que : « Lorsque la décision lui paraît susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l’instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu’y fasse obstacle la clôture éventuelle de l’instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué » ;

– l’article R. 600-5-1 de l’urbanisme que: « Sans préjudice de la mise en œuvre de l’article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’un vice n’affectant qu’une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l’annulation qu’il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l’autorisation pourra en demander la régularisation, même après l’achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d’annulation partielle est motivé. »

C’est dans ce cadre que le Conseil d’Etat a, en premier lieu, considéré que :

– lorsque, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, le juge administratif informe les parties, postérieurement à la clôture de l’instruction, que sa décision est susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office, cette information n’a pas par elle-même pour effet de rouvrir l’instruction ;

– la communication par le juge, à l’ensemble des parties, des observations reçues sur ce moyen relevé d’office n’a pas non plus par elle-même pour effet de rouvrir l’instruction, y compris dans le cas où, par l’argumentation qu’elle développe, une partie doit être regardée comme ayant expressément repris le moyen énoncé par le juge et soulevé ainsi un nouveau moyen.

De la même façon, le Conseil d’Etat est venu préciser que : « […] lorsque le juge administratif, alors qu’il envisage de faire usage des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, invite, ainsi que le prévoit cet article, les parties à produire des observations, ni cette invitation ni la communication par le juge des observations reçues en réponse à cette invitation n’ont, par elles-mêmes, pour effet de rouvrir l’instruction si elle était close. »

En deuxième lieu, et suivant la même logique, le Conseil d’Etat a considéré que : « si le juge administratif doit, lorsqu’il invite les parties à produire des observations sur la mise en oeuvre des dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, leur laisser un délai suffisant à cette fin, le délai dans lequel il communique aux autres parties les observations qui lui sont présentées en réponse à cette invitation est, en revanche, eu égard à l’objet de cette invitation, sans incidence sur la régularité de la procédure » de sorte que « […] les requérantes ne peuvent utilement soutenir que les observations présentées par la commune de Thonon-les-Bains en réponse à l’invitation faite par le tribunal leur auraient été communiquées tardivement. ».

CE, 10 octobre 2022, Société Horizon et autre c/ commune de Thonon-Les-Bains, req. n° 455573, publié aux tables du recueil Lebon