Tarification des redevances d’accès aux quais à voyageurs : une décision de la CJUE remet en cause les dispositions en vigueur en droit français et ouvre la voie à des régularisations au bénéfice des autorités organisatrices et des exploitants

Par un arrêt attendu rendu le 10 juillet 2019 (WESTBahn Management GmbH c/ ÖBB-Infrastrucktur AG, aff. C-210/18), la Cour de justice de l’Union européenne a jugé que les quais à voyageurs appartiennent à l’infrastructure ferroviaire, comprise dans les prestations dites « minimales », et non à la catégorie des gares de voyageurs et à leurs bâtiments et infrastructures.

 

Cette décision emporte des conséquences importantes en matière de tarification dans la mesure où, en vertu de l’article 31 de la directive 2012/34/UE du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen, les redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire pour l’ensemble des prestations minimales sont limitées au coût directement imputable à l’exploitation ; alors que les redevances imposées pour l’accès aux installations de services peuvent inclure, outre le coût de la prestation des services, une majoration permettant à l’exploitant de réaliser un bénéfice raisonnable.

 

Or, en droit interne, les quais à voyageurs sont intégrés à la catégorie des installations de services aux termes de l’article 1er du décret n° 2012-70 du 20 janvier 2012 relatif aux installations de service du réseau ferroviaire, l’article 3 du même texte précisant que les prestations régulées fournies dans ces installations donnent lieu à la perception de redevances dont le tarif « ne dépasse pas le coût de leur prestation majoré d’un bénéfice raisonnable », à lire en combinaison avec le II de l’article 13-1 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 relatif à l’utilisation du réseau ferroviaire (qui prévoit un principe de couverture des charges incluant une part liée à la rémunération des capitaux engagés).

 

Conformément à ces dispositions, SNCF Réseau (gestionnaire des quais à voyageurs) applique une méthode de tarification dite « Cost+ » qui intègre une part correspondant à la rémunération du capital investi.

 

La validité de cette méthode de tarification pourrait être directement remise en cause par l’arrêt rendu le 10 juillet 2019 par la CJUE et il appartient à présent à l’ensemble des acteurs intéressés du secteur ferroviaire français – y compris les autorités organisatrices compétentes – d’en tirer les conséquences qui s’imposent. Pour l’avenir immédiat, cela va de soi ; mais la possibilité de solliciter une éventuelle régularisation des tarifications appliquées depuis l’échéance du délai de transposition de la directive 2012/34/UE (16 juin 2015) pourrait également faire l’objet d’une réflexion approfondie.

 

 

CJUE, 10 juillet 2019, WESTBahn Management GmbH c/ ÖBB-Infrastrucktur AG, aff. C-210/18