Toute action en reconnaissance de droits adressée à l’administration, que celle-ci soit compétente ou non, est de nature à interrompre la prescription quadriennale à l’égard des bénéficiaires de cette action

Toute action en reconnaissance de droits adressée à l’administration, que celle-ci soit compétente ou non, est de nature à interrompre la prescription quadriennale à l’égard des bénéficiaires de cette action

Dans un avis du 15 novembre 2021, à paraître aux tables du Recueil Lebon, le Conseil d’Etat a considéré que lorsqu’une demande en reconnaissance de droits est introduite par l’envoi d’une réclamation préalable adressée à une autorité administrative incompétente, les délais de prescription et de forclusion opposables aux personnes susceptibles de se prévaloir des droits dont la reconnaissance est demandée sont interrompus à la date de cette réclamation, et ce y compris en ce qui concerne les délais de réclamation et recours prévus par le livre des procédures fiscales

Dans les faits, l’association UFC Que Choisir Nancy et sa région avait saisi le tribunal administratif de Nancy d’une demande tendant à ce que les contribuables de la métropole du Grand Nancy puissent, à leur demande, bénéficier d’une décharge de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères « TEOM » mise à leur charge au titre de l’année 2018.  

Dans un jugement du 23 décembre 2020, le tribunal administratif de Nancy a fait droit à la demande de l’association UFC Que Choisir Nancy et sa région.

Après avoir été saisie de l’appel interjeté par le ministre de l’Économie, des finances et de la relance, la cour administrative d’appel de Nancy a décidé de surseoir à toute décision au fond jusqu’à l’intervention de l’avis contentieux du Conseil d’Etat.

Tout d’abord, dans le cadre de l’avis contentieux commenté, le Conseil d’Etat a considéré que le contentieux doit être regardé comme lié, y compris lorsque l’autorité administrative incompétente ne transmet pas la réclamation préalable à l’autorité administrative compétente pour en connaître

Plus précisément, le Conseil d’Etat a considéré que le contentieux est réputé lié :

  • D’une part, lorsque l’administration incompétente pour en connaître rejette implicitement la réclamation en gardant le silence durant une durée de quatre mois à compter de sa saisine ;
  • D’autre part, lorsqu’avant l’expiration du délai de quatre mois précité, l’administration incompétente prend une décision de rejet motivée.

Ensuite, toujours dans son avis du 15 novembre 2021, le Conseil d’Etat a considéré que la demande présentée dans le cadre d’une action en reconnaissance de droits adressée à une autorité incompétente pour en connaître est de nature à interrompre le délai de prescription quadriennale et de forclusion à l’égard de chacun des membres du groupe de personnes au bénéfice duquel l’action en reconnaissance de droits est introduite

C’est dans ce cadre que le Conseil d’Etat a considéré que, toutefois, les délais : « […] recommencent à courir à compter de la date de publication de la décision statuant sur cette action passée en force de chose jugée, ou, à défaut de saisine du juge, à compter de la date à laquelle la décision de rejet de la réclamation préalable est devenue définitive. Pour l’application de cette règle, la date à laquelle la réclamation préalable est formée s’entend de la date à laquelle le demandeur l’a adressée à l’administration, peu important que cette administration soit ou non compétente. »

CE, avis, 15 novembre 2021, UFC Que Choisir Nancy et sa région c/ Ministère de l’économie, des finances et de la relance, n° 454125