Une décision du Tribunal des conflits vient préciser l’ordre de juridiction compétent pour juger le référé-précontractuel d’un groupement de commande constitué d’acheteurs concluant aussi bien des contrats de droit privé que de droit administratif.
La société nationale SNCF avait lancé une consultation, pour la conclusion d’un accord-cadre à bons de commande multi-attributaire portant sur des prestations de portage salarial, pour son compte ainsi que pour celui de quatre filiales du groupe SNCF dans le cadre d’un groupement de commande.
La SAS Cadres en mission, qui avait fait acte de candidature, s’était vu opposer une décision de rejet de son offre le 6 mars 2021. Elle avait donc assigné la SNCF devant le tribunal judiciaire de Paris sur le fondement des articles 1441-1 et suivants du code de procédure civile, afin qu’il soit enjoint à la SNCF de se conformer à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en reprenant la procédure dans son intégralité et que soit suspendu l’ensemble des décisions se rapportant à la procédure litigieuse, et notamment la décision de rejet de l’offre de la société requérante.
Le tribunal judiciaire de Paris, estimant que ce litige soulevait une question de compétence d’une difficulté sérieuse, avait saisi le Tribunal des conflits sur le fondement de l’article 35 du décret du 27 février 2015.
Dans l’affaire commentée, le Tribunal des conflits rappelle d’abord que la passation et l’attribution des contrats passés en application du code de la commande publique sont susceptibles de donner lieu à une procédure de référé précontractuel qui, selon que le contrat revêt un caractère administratif ou privé, doit être intentée devant le juge administratif ou devant le juge judiciaire.
Il analyse ensuite au sein du groupement de commande constitué à qui était majoritairement destiné le contrat de la commande publique litigieux (i) et quel était la nature des contrats que ce membre pouvait conclure (ii) pour déterminer l’ordre de juridiction compétent.
Il constate ainsi que la procédure de passation de l’accord-cadre en cause avait certes été lancée par la SNCF en son nom et pour son compte, qui est une société anonyme et, au sens du code de la commande publique, une entité adjudicatrice mais aussi pour celui de quatre filiales, parmi lesquelles figure SNCF Réseau.
Il relève alors, que l’accord-cadre litigieux était majoritairement destiné à répondre aux besoins de SNCF Réseau.
Or, si SNCF Réseau est désormais elle aussi une société anonyme, il résulte de l’article L. 2111-9-4 du code des transports que les contrats que conclut cette société pour l’exercice de ses missions prévues à l’article L. 2111-9 du même code sont des contrats administratifs par détermination de la loi.
Aussi, il en résulte pour le Tribunal des conflits que le contrat de la commande publique litigieux, passé par une entité adjudicatrice au nom et pour le compte de plusieurs sociétés, et destiné majoritairement à répondre aux besoins de l’une de ces sociétés dont les contrats passés en application du code de la commande publique sont des contrats administratifs par détermination de la loi, revêt lui-même un caractère administratif.
Par conséquent, le litige relevait de la compétence de la juridiction administrative.
TC, 13 septembre 2021, SAS Cadres en mission, n° C4224.