Modulation des pénalités de retard par le juge, mode d’emploi  

Par une décision en date du 29 avril 2021, la Cour administrative de Lyon apporte d’utiles précisions quant aux éléments à soumettre à l’analyse du juge pour la modulation des pénalités

En l’espèce, un centre hospitalier a conclu avec une société X un marché public de service portant sur la maintenance préventive et curative des ascenseurs et des monte-charges pour un montant annuel de 31 294,40 euros HT. Sa durée a été fixée à deux ans reconductible deux fois pour une période d’un an.

L’établissement hospitalier a appliqué des pénalités d’un montant de 39 118 euros notamment à raison d’un retard total de cent onze jours décomptés du 22 juin au 10 octobre 2017.

Le tribunal administratif de Dijon a reconnu le bien-fondé de ces pénalités mais a considéré qu’elles étaient manifestement excessives dès lors qu’elles représentaient près de 63% du montant HT du marché. Dans ce contexte, les premiers juges ont ramené le montant à la somme de 25 000 euros compte tenu de la longue indisponibilité du matériel et de l’absence d’éléments produits par le titulaire.

La société X demandait notamment à la Cour de réformer ce jugement en ce qu’il a retenu le bien-fondé des pénalités dues pour cent onze jours et de réduire ce retard à une durée de 41 jours non consécutifs.

La preuve de la durée du retard dans l’exécution, contestée par le titulaire, pèse sur l’acheteur

Dans un premier temps, la Cour administrative d’appel apporte des précisions s’agissant de la preuve de la durée du retard :

« au regard de ces explications et productions [du titulaire], et alors que le centre hospitalier, qui n’est pas pour sa part en mesure de produire les carnets d’entretien des appareils, n’apporte pas de contestation sérieuse à ces éléments probatoire, la société appelante est fondée à soutenir que son retard dans la réparation de l’ascenseur n° 139894 n’est pas démontré pour une période excédant celles du 20 juin au 3 juillet 2017 inclus et du 7 août au 3 septembre 2017 inclus. Il y a lieu de ramener son retard au vu de ces éléments à 42 jours et en conséquence, de fixer le montant les pénalités dues en application des stipulations précitées du CCP à la somme de 13 143,65 euros. ».

Le juge administratif peut moduler des pénalités de retard s’il est saisi par le titulaire de conclusions en ce sens

Soulignons que depuis la décision du Conseil d’Etat en date du 29 décembre 2008, OPHLM de Puteaux (req. n° 296930), il est loisible au juge administratif : « saisi de conclusions en ce sens, de modérer ou d’augmenter les pénalités de retard résultant du contrat, par application des principes dont s’inspire l’article 1152 du code civil, si ces pénalités atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire eu égard au montant du marché ».

Après avoir rappelé le principe de l’arrêt OPHLM de Puteaux, la Cour administrative d’appel de Lyon précise que pour faire droit à cette demande de modulation, il appartient au titulaire du marché de fournir au juge :

« tous éléments, relatifs notamment aux pratiques observées pour des marchés comparables ou aux caractéristiques particulières du marché en litige, de nature à établir dans quelle mesure ces pénalités présentent selon lui un caractère manifestement excessif ».

Autrement dit, le juge doit disposer d’éléments permettant de comparer le montant des pénalités infligées aux montants que des retards similaires auraient provoqués dans des marchés comparables.

Dans ces conditions, le juge pourra :

  • Soit rejeter les conclusions dont il est saisi en faisant application des clauses du contrat relatives aux pénalités ;
  • Soit rectifier le montant des pénalités dans la seule mesure qu’impose la correction de leur caractère manifestement excessif.

CAA Lyon, 29 avril 2021, req. n° 19LY02718, Inédit au recueil Lebon

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